• ARNOUL

    Deux saints portent ce nom : un évêque de Metz au VIIe s. et un évêque  de Tours, martyr au VIe s. ; fête le 18 juillet. Une commune du Calvados porte son nom : Saint-Arnoult.

     

    « ARNOUL — saint martyr du sixième siècle, compté parmi les évêques de Metz , patron des brasseurs de bière. Il fut martyrisé, dit-on, au diocèse de Reims. Tandis qu'on emportait son corps pour l'enterrer à Tours, selon le désir qu'il en avait témoigné, son corps demeura miraculeusement immobile dans la forêt d'Yveline, à huit lieues de Chartres. On fut obligé de l'enterrer au milieu du chemin : on y bâtit ensuite une église où l'on garde son corps, et autour de laquelle se forma un gros bourg qui porte le nom de Saint Arnoul (1). » (1) Histoire de l'auguste et vénérable église de Chartres, chap. 9.

    Extrait de Critique des reliques et des images miraculeuses par J.-A-S. Collin de Plancy. Tome Premier, Paris Guien et Compagnie, Libraires, Bd Montmartre 1821.

     

    SAINT-ARNOULT :

             "L'existence de deux saints portant le même nom et fêtes le même jour pose un problème de choix. Au saint Arnoul, évêque de Metz au VIIe siècle, nous préférerons saint Arnoul, évêque présumé de Tours et martyr au VIe siècle, pour des raisons géographiques (qui ne nous procurent aucune certitude). Arnoul est né vers 470 de dignitaires francs baptisés. Marié à une nièce de Clovis, il se sépara de son épouse afin de partir pour des pèlerinages. Il passa ainsi à Tours dont il devint peut-être évêque avant de reprendre son errance. Il aurait été attaqué si virilement par des parents de sa femme lors d'un passage à Reims qu'il n'aurait pas survécu à cette agression. Son culte s'est répandu en Normandie où on lui prête la faculté de rendre la vigueur aux enfants "languissants". Peut-être faut-il attribuer ce pouvoir magique reconnu par la tradition populaire à la robustesse des membres indispensable au saint lors de ses multiples pérégrinations. Actuellement, ce culte ne parait être demeuré vivant qu'en un seul lieu, à Touques (canton de Trouville), dans l'ancienne paroisse de Saint-Arnoult. On l'invoque pour les petits enfants ayant des difficultés à marcher. Une source miraculeuse attire les mères inquiètes qui plongent les jambes de leurs petits dans son eau."

    in Les saints qui guérissent en Normandie d'Hippolyte Gancel, éditions Ouest France 1998.

     

             “À proximité du chevet de l'église du prieuré, au milieu des arbustes et autres végétations, naissent deux sources qui, autrefois, étaient les lieux de pèlerinages. Une, consacrée à Saint-Clair (décidément apprécié) était plus particulièrement fréquentée par les malvoyants ; ses eaux, prétendait-on, soulageant les maux atteignant les yeux, en souvenir du saint évêque de Nantes qui, dit la légende, rendait la vue aux aveugles en apposant ses mains sur leurs paupières, vers l'an 200. La seconde est appelée “Fontaine de Saint-Arnoult”. Son eau, autre légende, redonnait des forces aux enfants de faible constitution. Le guide Joanne, édité en 1894, nous apprend qu'en cette fin du XIXe siècle, “On conduisait à cette fontaine un grand nombre d'enfants débiles, à certaines périodes de l'année. Une paysanne, habitant à proximité de cette source, s'était même attribué le soin, moyennant rétribution, de les plonger dans l'eau, mais aussi d'aider également les adultes à s'y baigner”.

    in Nos Villages Augerons de Jean Bayle, Éditions Charles Corlet 1998.

    ARNOUL  ARNOUL

    “ L'évêque de Reims. Arnolphus, personnage énigmatique du VIe siècle, semble à l'origine de Saint‑Arnoult. D'après la légende, il serait passé à Saint‑Arnoult-sur‑Touques après être passé à Saint-Arnoult‑en‑ Yvelines. Le village a dès lors pris une importance considérable grâce à son identité religieuse. Dès le milieu du XI siècle, et jusqu'au XVIIIe siècle, les seigneurs de France font construire leur demeure sur les différents fiefs de Saint-Arnoult. Les ruines des châteaux de Lassay et d'Estimauville subsistent encore. Dotée de deux fontaines réputées miraculeuses, la paroisse est, jusqu'au milieu du XXe siècle, un lieu de pèlerinage important, notamment le 23 juin et le troisième dimanche de septembre. (…) Fontaines, XIe siècle : L’une des deux fontaines miraculeuses de Saint‑Arnoult‑sur‑Touques est dédiée à saint Clair, qui a le don de guérir les maladies oculaires. La seconde est placée sous le patronage de saint Arnoult. À partir du XIe siècle, les parents viennent parfois de très loin y plonger leur enfant de faible constitution, afin de loi redonner force et vigueur. Ces pèlerinages ont eu lieu jusqu'aux années 1970. ”

    in Le Patrimoine des Communes du Calvados, Flohic éditions 2001.

    ARNOUL  ARNOUL

    “ Il existe plusieurs saints portant le nom d’Arnoul. Le premier, évêque de Soissons, fêté le 15 août, aurait vécu de 1040 à 1087. Le second, évêque de Gap, vivant au XIe siècle, fêté le 19 septembre, serait mort en 1070. Deux autres sont fêtés le 18 juillet. L’un, évêque de Metz, grand-père de Pépin d'Héristal, aurait vécu de 580 à 640. L’autre serait né vers 470 et mort en 534. Celui qui nous intéresse est sans doute ce dernier. Sa vie nous est connue à travers la légende. Selon cette légende, il serait né de parents appartenant aux Francs de haut rang qui avaient reçu le baptême des mains de saint Rémi, évêque de Reims. Clovis le fit comte de Reims avant qu'il n'épouse sa propre nièce, Scariberge. Deux fils naquirent de cette union. Puis, les deux parents décidèrent de se séparer. Arnoul entreprit alors de longs voyages vers la Palestine, puis à Rome, puis à Toulouse et à Tours où il visita le tombeau de saint Martin et où il fut déclaré évêque par acclamation (vraisemblablement à titre transitoire). Il quitta néanmoins Tours pour reprendre sa vie de pèlerin. Il alla prêcher en Espagne. Il revint finalement à Reims où il fut victime d'un attentat qui lui coûta la vie. Une légende parallèle mentionne que le corps d’Arnoul fut ramené dans les Yvelines par Scariberge, son épouse, qui fit construire un tombeau. C'est à partir de cette sépulture que fut édifié le prieuré de Saint‑Arnoult‑enYveline.

    Saint Arnoul est guérisseur, mais, actuellement, il n'est plus guère invoqué qu'en un seul endroit en Normandie. A Saint‑Arnoult‑sur‑Touques (canton de Trouville‑sur‑Mer), dans le Calvados, existe toujours une fontaine Saint‑Arnoul (ou Saint‑Arnoult). Cette fontaine, protégée par un vieux mur, reçoit encore la visite de parents venus pour soigner leurs enfants atteints de rachitisme ou manquant de force. Les vertus de l'eau étaient déjà connues très anciennement. Au moins vers le Xe siècle, on venait déjà plonger les enfants chétifs dans cette fontaine. La pratique de l'immersion s'est ainsi perpétuée durant des siècles puisque des pèlerinages très suivis avaient lieu jusqu'à une période récente. De nos jours, ces dépla­cements collectifs ont cessé, mais les visites individuelles se poursuivent comme par le passé. Et, même si le corps de l'enfant n'est pas totalement immergé, on use largement de l'eau salvatrice. Si l'on se réfère à des té­moignages sérieux, il y a quelques décennies, les pèlerins se bouscu­laient devant la fontaine et il fallait avoir recours à une voisine de la fon­taine qui, moyennant gratification, se chargeait d'opérer le bain dans l'eau de la fontaine. Une fontaine Saint‑Clair, également fréquentée, se situe à proximité de la fontaine Saint‑Arnoul.

    in Les saints qui guérissent en Normandie, tome 2, d'Hippolyte Gancel, éditions Ouest France 2003.


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  • AUBERT

    Evêque d’Avranches

     

    BAYEUX :

    Concernant ce saint, voir aussi l’article ci-après extrait de : Les saints dans la Normandie médiévale – colloque de Cerisy-la-Salle, 1996 ; Presses Universitaires de Caen, 2000. Chapitre : “ Les reliques de la cathédrale de Bayeux ” par F. Neveux.


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  • AUBIN

    Né en 469, mort le 1er mars 550 ; abbé de Cincillac puis évêque d'Angers en 529 ; Fête le 1er mars. Trois communes du Calvados portent ce nom : Saint-Aubin-d’Arquenay, Saint-Aubin-des-Bois et Saint-Aubin-sur-Mer.

     

    ANCTOVILLE / AUQUAINVILLE : 

    “ Dans le Calvados, à Sermentot (commune d’Anctoville et canton de Caumont-l’Éventé), une église lui est dédiée et un beau vitrail lui est consa­cré. On lui reconnaît habituellement une spécialité de “ guérisseur ” de la coqueluche. La paroisse d’Auquainville (canton de Livarot) possède une chapelle Saint-Aubin. ”

    in Les saints qui guérissent en Normandie, tome 2, d'Hippolyte Gancel, éditions Ouest France 2003.

     

    SAINT-AUBIN-DES-BOIS :  

             "L'évêque d'Angers est encore invoqué contre la coqueluche".

    in "Saints guérisseurs, saints imaginaires, dévotions populaires" par Jean Seguin, 1929, rééd. Lib. Guénégaud Paris 1978.

     

             "Aubin naquit en 469 dans le Vannetais. Il appartenait à une riche famille d'Armorique. Après une période monastique à Cincillac, près d'Angers, il devint abbé avant d'être élevé en 529 à l'épiscopat d'Angers, ville où il mourut le 1er mars 550. Durant sa vie, il s'appliqua à soulager les pauvres, les affligés, consolant, soignant avec un zèle admirable. Il opéra de nombreux miracles qui se prolongèrent lors des visites rendues à son tombeau au Moyen Age, époque à laquelle il fut l'un des saints les plus populaires. Ses spécialités thérapeutiques sont vraisemblablement en rapport   étroit avec les miracles qui lui sont attribués, mais saint Aubin ne fait pas partie des grands saints guérisseurs. (...) Dans le Calvados, le principal lieu où le culte demeure vivant est Saint-Aubin-des-Bois (canton de Saint-Sever). Là, pour obtenir la guérison de la coqueluche, il est nécessaire de faire toucher la statue par le petit malade."

    in Les saints qui guérissent en Normandie d'Hippolyte Gancel, éditions Ouest France 1998.


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  • AURELLE

     

     

    CAEN :  

             On trouve dans la chapelle St.-André (anciennement Sainte-Magdeleine) de l'abbatiale Saint-Étienne de Caen (Abbaye-aux-Hommes) trois reliquaires contenant des reliques de saints. Le premier contient des reliques de saint Honorat M, saint Salvat M, saint Aurelle M, saint Urbain M et saint Modeste M, le second le corpus de Saint Fidelis M et le troisième de saint Firme M, saint Germain M, saint Félix M, saint Vincent M et saint Fauste M. Le M désignant martyr.


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  • BARBE

    Patronne des mineurs, des artilleurs et des pompiers. Fête le 4 décembre.  

    BARBE

     Sainte Barbe - Église de Courcy (Calvados)

    « BARBE - Sainte Barbe est la patronne des arquebusiers, des chasseurs et des marins. On donne son nom à la partie du vaisseau qui renferme la poudre. Elle préserve des incendies et du tonnerre, parce que ceux qui lui firent souffrir le martyre furent miraculeusement tués par la foudre du ciel (1).  

    A dire le vrai, on ne sait ni le temps, ni le pays où elle vécut, ni le nom de son père, qui lui fit couper la tête parce qu'elle était chrétienne. Cependant les légendes racontent longuement l'histoire de sa vie et de ses miracles. Mais les légendaires étaient peut-être aussi inspirés par l'esprit saint. 

    Quoi qu'il en soit, le corps de sainte Barbe était à la fois en Egypte, à Venise et à Plaisance. Il est encore dans ces deux dernières villes ; et en même temps l'on montre à Rome, dans l'église qui porte son nom, sa tête et son voile. Les feuillants de la rue Saint-Honoré, à Paris, avaient aussi des reliques de cette sainte; et tant d'églises se vantaient de participer au même avantage, que toutes les reliques de sainte Barbe auraient chargé plusieurs voitures à six chevaux. On en a perdu quelques débris dans ces derniers temps. On raconte que, comme sainte Barbe était vierge, lorsqu'on lui coupa la tête, elle ne saigna que du lait (2) ; et l'on montrait dans plusieurs couvents, surtout en Italie, des fioles pleines du lait de sainte Barbe. (1) Voyez Ribadéneira , 4 decembre. (2) Henri Etienne , Apologie pour Wrodntc , chap. 36. » 

    Extrait de Critique des reliques et des images miraculeuses par J.-A-S. Collin de Plancy. Tome Premier, Paris Guien et Compagnie, Libraires, Bd Montmartre 1821.  

     

    GRAYE-SUR-MER :  

             "M. le Curé m'a confirmé l'ancienne existence d'une très vieille confrérie ; d'autre part, nous savons que le prieuré de Sainte-Barbe-en-Auge était patron. Souvenir de cette confrérie ou de ce prieuré : un "portrait" de la sainte, en profil, réencadré, est relégué dans le bas de la nef de Graye. C'est une naïve peinture du XVIIIème siècle."

    in "Saints guérisseurs, saints imaginaires, dévotions populaires" par Jean Seguin, 1929, rééd. Lib. Guénégaud Paris 1978.

     

    MOLAY-LITTRY (Le) :  

             "Sainte Barbe avait sa fête patronale (dimanche suivant l'Ascension) à la mine de Littry".

    in "Saints guérisseurs, saints imaginaires, dévotions populaires" par Jean Seguin, 1929, rééd. Lib. Guénégaud Paris 1978.

     

    MÉZIDON-CANON : 

             "Toute la légende de sainte Barbe tourne, autour de l’ambiguïté du feu : vivant à Héliopolis (la ville du soleil) en Egypte, elle n'en voit pas les rayons puisque son père la séquestre dans une tour hermétique. Après son martyre, un 4 décembre, son indigne père est frappé par la foudre. Pour cela elle est patronne des mineurs, des artilleurs et des pompiers. Sa célébrité en Pays d'Auge provient du fait que son plus ancien lieu de culte en France, enrichi de reliques venues d'Edesse en Orient, se situe à Ste.-Barbe-en-Auge (prieuré du XIe siècle situé en Ecajeul près de Mézidon)."

    in Randonnées et Patrimoine en Pays d'Auge, T.III, de J. Lalubie (1987).

    BARBE

         “Création de Mézidon : En 987, Hugues Capet monte sur le trône de France. Quelques années plus tard, en 1035, Guillaume le Bâtard devient duc de Normandie. Ce dernier réside souvent à Falaise et a en grande estime le seigneur d'Ecajeul, Odon Stigand. Son fief est situé sur les bords de la Dives, sur la rive droite, non loin d'un endroit où l'on peut passer ce cours d'eau à gué. Ce passage relie un petit hameau d'Ecajeul, nommé Ecajolet, à la rive gauche qui s'appelait alors Canon. Il y a encore entre la Dives et son affluent le Laizon, qui coule plus à l'Ouest, de nombreux bois qui s'étendent du nord de Falaise jusqu'au confluent des deux rivières. Ce sont d'ailleurs ces bois et bosquets qui sont à l'origine du nom d'une petite paroisse avoisinante : Le Breuil.

    Et Mézidon, me diriez-vous ? Eh bien, il n'en n'est pas question à cette époque. Et nous voici en l'an de grâce 1050. Odon, seigneur d'Ecajeul, reçoit son suzerain le duc Guillaume. Ce dernier, qui sait que le seul gué sur la Dives depuis la mer est celui situé sur les terres d'Odon, décide de protéger ce point stratégique et demande au seigneur d'Ecajeul de construire une forteresse près du gué. Bientôt un véritable château s'éleva à l'endroit prévu par Guillaume. Il est difficile aujourd'hui d'en situer l'emplacement exact; cependant, on peut supposer qu'il se dressait entre les deux bras existant alors. L'ensemble principal, avec une première enceinte, devait couvrir de chaque côté de la route actuelle les maisons et jardins avoisinants. Une deuxième enceinte, plus éloignée, devait englober la mairie actuelle, l'église Notre-Dame construite sur l'emplacement de la chapelle du château et la caserne des pompiers.

    Je me souviens que les ouvriers qui firent la tranchée pour recevoir la citerne à essence de la station-service se heurtèrent à d'énormes dalles de pierre qui ne pouvaient être venues là naturellement. On en trouva également sous le préau de l'école (la caserne des pompiers). Ces découvertes semblent confirmer cette hypothèse. Ce château, qui devait être assez important, était donc construit à Ecajolet, dont la petite église Saint-Martin était située à gauche de la voie qui conduisait à Ecajeul. Le nouveau fief ainsi créé sur la paroisse d'Ecajeul fut agrandi de terres retirées à Canon sur la rive gauche de la Dives. Odon Stigand ajouta alors à ses titres celui de baron de Mézidon, en latin Mansion Odonis, autrement dit maison d'Odon. Peu à peu, ce nom se transforma pour devenir Mezedon, puis Mézidon, forme que nous connaissons aujourd'hui. J'ai pu constater que cette orthographe existait déjà sur une très vieille carte du XVIe siècle. Les armoiries de Mézidon étaient "de gueule à écusson d'argent en abîme accompagné de huit étoiles d'or".

    Ce premier baron de Mézidon était un personnage connu et estimé. Au début du xi- siècle, il avait accompagné le duc Robert le Diable à Jérusalem en 1035. Ce dernier étant décédé là-bas, il y était resté quelque temps après la mort du duc. De retour en 1050, il se vit confier la construction de la forteresse par Guillaume. Il était de ceux qui se trouvaient souvent auprès du duc de Normandie. Il nous est d'ailleurs resté un texte qui illustre les sentiments de celui-ci à son égard.

    En 1064, après avoir battu Herbert, comte du Mans, Guillaume ramena en Normandie la jeune sœur de ce dernier, Marguerite, fiancée à Robert Courteheuse, héritier du duché. Guillaume la confia à Odon pour l'élever, en prendre soin et l'éduquer d'une manière digne d'elle. Voici la traduction du texte historique, œuvre du moine Ordéric Vital, qui nous a laissé de nombreux témoignages sur son époque : "Le duc envoya la belle Marguerite à Stigand, qui était le puissant Seigneur de Mézidon, afin qu'il l'élevât convenablement. Mais, avant d'avoir atteint l'âge de se marier, elle fut heureusement soustraite par la mort aux séductions du monde et on l'inhuma dans le monastère de la Sainte-Trinité de Fécamp.”

    En 1066, lorsque Guillaume va s'embarquer pour la conquête de l'Angleterre, Odon, trop âgé, ne peut suivre, mais il va faire un voyage à Rouen vers la fin octobre, et c'est dans cette ville qu'il s'éteint le 17 novembre 1066. Il est inhumé dans le cloître de la grande abbaye de Saint-Ouen de Rouen, en présence de Manville, archevêque de Rouen, de Roger de Beaumont, chancelier du duché, et d'un grand nombre de seigneurs normands. Tous ces détails nous permettent de conclure qu'il était un personnage hautement honoré dans le duché.

    Au moment de la fondation de Mézidon, Odon avait trois fils : Odon, Robert et Maurice, et deux filles, Cécile et Agnès. Cécile se consacrera à Dieu dans la grande abbaye que la reine Mathilde avait fondée à Caen, sous le vocable de la Sainte Trinité en 1066. Ce couvent (abbaye aux Dames) existe encore de nos jours.

     

    Le vieil Odon avait donc accompagné le duc Robert à Byzance. Il faut souligner que les empereurs appréciaient particulièrement les compagnies de mercenaires normands qui leur servaient de gardes du corps. Lorsque le duc Robert meurt à Nicée en 1035, Odon rentre peu après en Normandie, puisque son fils, également appelé Odon, naît en avril 1036. Ce dernier, comme d'ailleurs son plus jeune frère Robert, se rendra au Moyen-Orient. Il y sera très apprécié par l'empereur Isaac 1er Comnenus, qui en fera le commandant de sa garde personnelle. Cette faveur était due à ses qualités de soldat, mais aussi à sa connaissance parfaite du grec et d'autres langues, dit la chronique. Il servait donc d'interprète. La garde était précédemment composée d'eunuques, mais Isaac ler voulait se libérer de cette coutume.

    La chronique dit également que le jeune Odon a des connaissances pour soigner les hommes, les chevaux et les oiseaux. Il s'est intéressé et tente de préserver l'héritage médical de l'antiquité. Ceci, d'ailleurs, en continuation de la politique suivie en la matière par les empereurs de Constantinople. Les oiseaux sont particulièrement protégés dans leurs jardins et leurs réserves. Odon est chargé de cet entretien. C'est sans doute pourquoi, rentré en Normandie, il créa le premier zoo d'Europe de l'Ouest en Angleterre.

    Son jeune frère Robert rapportera quelques reliques de sainte Barbe, ce qui représente un réel privilège. Il existait une chapelle dédiée à cette sainte dans le palais impérial. Ces reliques lui furent donc données par l'empereur, en récompense des bons et loyaux services des deux frères. Robert rentre vers 1055. Si l'on sait que Odon, son frère aîné, était encore à Constantinople pour le couronnement de Constantin X le 25 décembre 1059, les deux frères ont dû s'y trouver ensemble. Mais tandis qu'Odon, commandant de la garde, interprète, médecin et vétérinaire, séjourne habituellement au Moyen-Orient, Robert lorsqu'il rentre, profite de la renommée de son aîné pour en tirer quelques profits. En effet, outre les reliques de sainte Barbe, il rapportera de l'or et des pierres précieuses, en particulier des topazes très à la mode chez les Normands. En 1066, il prend part à la conquête de l'Angleterre avec le duc Guillaume.

    Sainte-Barbe supplante saint Martin : Lorsque Robert rentre du Moyen-Orient avec les reliques de sainte Barbe, martyre de Nicomédie, son frère Maurice est très gravement malade. Les reliques opèrent une guérison miraculeuse et, très vite, il est hors de danger. Le vieil Odon, qui avait cru perdre son fils, conçut alors une très grande vénération pour la sainte et fit transporter solennellement ses restes dans l'église Saint-Martin d'Ecajolet. Il dotait l'église de revenus suffisants à l'entretien de six chanoines qu'il chargeait de garder les restes précieux et de chanter quotidiennement l'office divin. Un dixième des droits perçus lors du marché du samedi matin qu'il avait créé revenait à la communauté ainsi qu'un liard versé par chaque propriétaire foncier au lendemain de la foire Saint-Martin le 12 novembre. Désormais cette église, devenue un sanctuaire protégé par le vénéré baron de Mézidon, allait connaître une popularité croissante. On accourait de toute la Normandie et, dit-on, de nombreux miracles s'accomplissaient.

    Le culte ainsi rendu à sainte Barbe fit oublier celui de saint Martin et, peu à peu, le lieu changea de nom et l'on parla de Sainte-Barbe en Auge.

    En 1058, Odon Stigand renouvela et compléta ses donations par une charte qui fut confirmée par le duc Guillaume. Pour la première fois, nous relevons dans le texte latin le nom du seigneur de Mézidon : Stigandus de Manso Odonis, soit en français : Stigand de Mez Odon, mez signifiant maison au nord de la Loire.

    En 1066, Odon laissait en dot à sa fille Cécile, qui prenait le voile à l'abbaye de la Sainte-Trinité de Caen, le patronage et les dîmes des églises de Falaise et de Guibray qui lui appartenaient.

    Après la mort d’Odon Stigand, la baronnie échut à son fils Maurice, qui alla habiter le château fort, construit en bois comme cela se faisait à l'époque, ce qui explique son incendie futur. Il abandonnait ainsi le vieux manoir ancestral du Bois du Prieuré. En souvenir de sa guérison, il entreprit la construction d'une nouvelle église ; en effet, en raison de l'affluence des pèlerins, l'ancienne chapelle était devenue trop petite. Cette nouvelle église, beaucoup plus grande, comportait deux clochers. On construisit également deux cloîtres, un mur d'enceinte et des bâtiments dont quelques-uns ont échappé aux destructions de la période révolutionnaire. Le portail actuel de la ferme de Sainte-Barbe a été reconstruit sur l'emplacement de l'ancien. Il nous reste deux bâtiments: la grange aux dîmes, acquise dernièrement par la ville, et un bâtiment de la ferme appelé le dortoir des moines. Sa toiture a brûlé et a été détruite. Elle a été refaite en matériaux modernes en 1988.

    Le baron de Mézidon, seul rescapé de la Blanche Nef

    A la mort de Maurice, son frère Robert étant décédé sans descendant en 1086, il n'y eut pour hériter qu'une jeune fille, Agnès, que l'on a pensé être la sœur de Maurice et de Robert. Je croirais plutôt qu'il s'agissait de la fille de Maurice, qui portait le même prénom que sa tante, peut-être aussi sa marraine. Cette petite-fille de Odon Stigand se trouvait être d'un âge beaucoup plus en rapport avec celui de son mari Rabel ou Raoul de Tancarville, qui devint ainsi le troisième baron de Mézidon.

    Ce dernier reprocha à ses beaux-parents d'avoir été trop généreux avec les chanoines installés à Sainte-Barbe. En tant que suzerain, il refusa de ratifier une donation faite au profit de la communauté par l'un de ses vassaux guéri miraculeusement. Il réclama pour lui-même les biens du défunt. Hélas, peu après, il tomba gravement malade. Sur les instances de sa femme, il promit alors de se montrer plus juste et de signer la ratification de la donation. Ayant ainsi soulagé sa conscience, il ne tarda pas à recouvrer la santé ; de plus, il devait par la suite échapper à une bien plus terrible catastrophe.

    Le royaume de Guillaume le Conquérant était tombé dans les mains de son troisième fils Henri après la mort de son frère Guillaume le Roux. Mais le deuxième fils Robert s'était fait reconnaître duc de Normandie par une assemblée de barons normands. Henri ler avait donc été obligé de venir reconquérir son duché. Vainqueur de Robert et de ses alliés de Flandre et d'Anjou, il avait fait reconnaître son fils Guillaume comme héritier par les seigneurs normands. Cela fait, il envisageait de rentrer en Angleterre.

    La traversée devait s'effectuer sur le vaisseau royal, mais tous les jeunes nobles décidèrent de suivre sur le vaisseau de Thomas, fils d'un guerrier normand Étienne, à bord duquel le Bâtard était parti pour la conquête de l'Angleterre. Le bateau de Thomas était neuf et déployait ses voiles blanches - d'où son nom, La Blanche Nef - dans le port de Barfleur. Joyeusement, les enfants du roi et toute la jeunesse se précipitèrent sur le nouveau vaisseau. Ils suivaient la route du bateau du roi quand un choc terrible éventra la carène. La mer pénétra en grondant dans la coque et les malheureux naufragés ne purent que pousser un grand cri de misère qui fut entendu de la nef du roi, où l'on pensa qu'il s'agissait de cris de jeux. Un seul jeune homme put se cramponner à la grande vergue. C'est de lui que l'on connut des détails de ce drame. Il s'appelait Rabel de Tancarville, baron de Mézidon. Nous étions en 1120 et Raoul, pensant à une nouvelle intervention miraculeuse de sainte Barbe en sa faveur, décida d'accorder de nouveaux bienfaits à la communauté.

    En 1128, les chanoines successeurs de ceux qu'avait installés Odon n'avaient pas une conduite très édifiante. Raoul décida de les remplacer par des chanoines réguliers de l'Ordre de Saint-Augustin, de sorte que Sainte-Barbe, de collégiale qu'elle était, devint prieuré. Raoul lui donna ce qu'il possédait sur la rive droite de la Dives, couvert comme aujourd'hui de riches pâturages. Cette donation fut ratifiée par une charte de Henri ler, duc de Normandie et roi d'Angleterre. Les témoins furent le comte de Gloucester, Guillaume de Varenne, Robert de Leicester, Jean évêque de Lisieux, Toutain archevêque d'York et le fils de Raoul, Guillaume de Tancarville.

    Le prieuré reçut également de Eudes de Canon des terres situées à Mesnil Mauger et ailleurs. La renommée du prieuré s'étendit à toute la région et de nombreux visiteurs et pèlerins affluèrent vers ce centre important de vie intellectuelle et religieuse. ”

    In Mézidon-Canon et ses environs, Vie et Images du Passé – Ville de Mézidon-Canon, 1991.

     

    “ Les reliques. On n'imagine guère de nos jours de lieu de culte d'un saint sans sa statue, son "image". Au XIe siècle, il y avait des peintures murales mais pas de statues en ronde-bosse. Par contre il y avait des reliquaires. On sait que, fuyant les pirates Vikings, moines et clercs de nos diocèses emportèrent avec eux, et souvent fort loin, les corps saints de leurs monastères et églises. C'était pour eux des trésors plus précieux encore que les vases sacrés et autres richesses mobilières. Une des conséquences; de cet exode fut de propager, à grande distance le culte de plusieurs saints pré normands dont l’audience serait peut-être restée régionale. Le cas le plus extraordinaire fut sans doute celui du Cotentinais saint Marcoul, devenu à Corbény, non loin de Reims, saint dynastique. La dispersion au loin des châsses fut cruellement ressentie lors de la réorganisation religieuse du duché. Pas de culte possible sans reliques. Or la “récupération ” s'avéra très difficile. L'abbaye Saint-Ouen de Rouen eut la chance de se foire restituer, dès le Xe siècle, le corps de son saint patron, et cela explique certainement son importance comme lieu de pèlerinage au XIe siècle. Quelques corps saints avaient pourtant été "oubliés" in situ. Quelle aubaine de les retrouver après la tourmente. Ce fut le cas de saint Evroul dont le corps fut rependant volé par Hugues de France en 946 et emporté à Orléans. Les moines du Mont-Saint-Michel retrouvèrent le corps de saint Aubert vers 1012. Ceux de Saint-Wandrille, en 1026, le corps de saint Wulfran dont la châsse parcourut le diocèse lors des grandes épidémies médiévales. On retrouva saint Contest à Bayeux, saint Sever au lieu qui porte son nom ; mais un commando venu de Rouen le transporta à la cathédrale métropolitaine. Les rapts de reliques furent choses courantes, masqués par de pieuses légendes, par exemple la châsse qui se fait trop lourde pour aller plus loin d'où l'origine du culte de saint Hildevert à Gournay-en-Bray. Et puis il y eut des supercheries : le pauvre évêque de Bayeux, Odon de Conteville, frère utérin du duc Guillaume, se vit attribuer par les gens de Corbeil, les restes mortels d`un paysan, alors qu'il attendait le corps de saint Exupère. L'évêque de Sées, plus heureux, réussit à se faire restituer les ossements de saint Latuin, son premier prédécesseur que conservait l’église d’Anet, mais cela seulement en ... 1970 !

    Finalement on dut, un peu partout, se contenter de parcelles osseuses. Les corps saints, partis intacts au IXe siècle, furent véritablement dépecés. Les châsses firent place aux reliquaires. Notons que les premières statues en ronde-bosse furent presque toutes des reliquaires, telle celle de sainte Foy à Conques. Mais, grâce à cette fragmentation, devenue courante et universelle, la Normandie vit arriver des reliques de saints qui lui étaient totalement étrangers, et ce tut l'origine d'un mouvement d’importation qui allait se poursuivre tout au long des siècles. Ainsi s'implantèrent chez nous au XIe siècle les cultes de sainte Catherine, de sainte Barbe, de sainte Madeleine, de sainte Foy, de saint Valentin, de saint Blaise. C'est l'époque où les monastères commencèrent à se constituer leurs trésors de reliques, le Mont-Saint-Michel par exemple, comme l'indique Robert de Torigni. ”

    In Guillaume le Conquérant et son temps - catalogue d’exposition – Art de basse-Normandie n°97 – Hiver 1987-1988.

     

    “ Même origine, et à peu près à la même époque, pour la dévotion à sainte Barbe. Son plus ancien lieu de culte en France pourrait bien être le prieuré de Sainte-Barbe-en-Auge. Toute légende mise à part, ce fut assurément l'arrivée de reliques venues d'Orient à Saint-Martin-d'Ecajeul qui détermina la fondation du prieuré Sainte-Barbe, dont le premier acte remonte à 1055. ”

    in Le culte populaire et l’iconographie des saints en Normandie – Etude générale – par le Dr Jean Fournée – Société Parisienne d’Histoire et d’Archéologie Normandes, N° spécial des cahiers Léopold Delisle, 1973.

     

    PÉRIGNY :

             “ Statue de sainte Barbe du XVIème siècle en pierre polychrome dan l’église : Cette statue rustique était autrefois très honorée à Périgny. Les habitants proclamaient que sainte Barbe avait toujours préservé leur paroisse du tonnerre, d'où le dicton “ Tant qu'en cette église Barbe on vénérera, Périgny du tonnerre elle préservera ”. ”

    in Le Patrimoine des Communes du Calvados, Flohic Éditions, 2001.

     

    PÉRIGNY / AUBERVILLE / LÉCAUDE / POTIGNY / BANNEVILLE-SUR-AJONC / VIENNE-EN-BESSIN :

    “ Vierge et martyre du IIIe siècle. Selon la légende qui nous retrace sa vie, elle est née à Nicomédie (Asie Mineure). Ses parents étaient de riches païens. Elle fut élevée sévèrement et son père, redoutant la présence d'hommes à ses côtés, la fit enfermer dans une tour. Il prétendit lui faire épouser de force un fiancé qu'il avait choisi seul. Elle refusa de lui obéir et se convertit à la religion nouvelle. Son père l'ayant menacée, elle s'enfuit. Elle fut arrêtée et remise au gouverneur romain. Ce dernier lui imposa un supplice d'une grande cruauté. Après les coups, après l'exposition publique, on lui trancha les seins. Finalement, c'est son père lui-même qui la décapita. La tête de la malheureuse, précise la légende, frappa le sol. A ce moment, un orage d'une rare violence éclata et le père fut terrassé par la foudre. Ce fait légendaire explique la vocation protectrice de sainte Barbe (par ailleurs patronne des pompiers) et le culte qui lui est rendu.

    Ce culte ne se répandit pas tout de suite en Occident. Le retour des reliques détenues en Orient entraîna une vague de miracles parmi lesquels un certain nombre de guérisons.

    En Normandie, sainte Barbe est fêtée en de nombreux endroits. Dans le Calvados, à Périgny (canton de Condé‑sur‑Noireau), la tradition veut que la sainte soit invoquée pour préserver de la foudre. On allait prier au pied de la statue placée dans l'église Saint-­Julien. Les sollicitations n'ont sans doute pas totalement cessé. A Auberville (canton de Dozulé) comme à Lécaude (canton de Mézidon‑Canon), la sainte est priée pour la protection contre la foudre. La chapelle Sainte‑Barbe de Potigny, de construction récente, ne semble pas étrangère aux mêmes besoins de sécurité, ici touchant, autrefois, les dangers de la mine. A Banneville‑sur-Ajon (canton de Villers‑Bocage), la sainte protège de la même manière. L’église de Vienne‑en-­Bessin (canton de Ryes) possède une statue de sainte Barbe. On considère ici que la protection touche les problèmes liés aux orages et à la mort subite. ”

    in Les saints qui guérissent en Normandie, tome 2, d'Hippolyte Gancel, éditions Ouest-France 2003.

     

    VIENNE‑EN‑BESSIN

    “ Statue de sainte Barbe, XVIe siècle en calcaire dans l’église Saint‑Pierre‑et‑Saint‑Gorgon : Sainte Barbe est représentée avec ses attributs : la tour, la plume et le livre. La tour rappelle l'histoire selon laquelle elle est enfermée dans une tour par son père et s'en échappe en perçant une fenêtre. La fondation de l'abbaye Sainte‑Barbe-en‑Auge, en 1055, marque certainement le début de ce culte très populaire en Normandie. Sainte Barbe protège contre la foudre et contre la mort subite, elle est aussi la patronne des artilleurs, des carriers et des mineurs. Une légende récente s'attache à cette statue : les anciens du village assurent qu'en 1944, après un bombardement qui touche la commune et épargne l'église, cette statue est retrouvée, retournée face contre le mur. ”

    in Le Patrimoine des Communes du Calvados, Flohic éditions 2001.

     

    VIRE :  

             "La sainte était patronne des tisserands".

    in "Saints guérisseurs, saints imaginaires, dévotions populaires" par Jean Seguin, 1929, réédition. Lib. Guénégaud Paris 1978.


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  • BARTHÉLÉMY

    L’un des douze apôtres, connu également sous le nom de Nathanaël. Fête le 24 août. 

     

    « BARTHELEMI — l'un des apôtres. Sans avoir rien de certain sur sa vie, Eusèbe a prétendu que saint Barthélemi était allé prêcher dans l'Inde, dans l'Arabie-Heureuse, dans la Perse et dans l'Abyssinie (1). Les légendaires ajoutent qu'Astyage, roi d'Arménie, le fit écorcher vif. Sa qualité d'apôtre de Jésus-Christ a fait rechercher ses reliques. 

    On commença au sixième siècle seulement à songer à lui. On publia qu'il avait été martyre. On chercha son corps qui ne manqua pas de se trouver. Ce corps fut dès lors en même temps à Dara en Mésopotamie, et dans l'île de Lipari, près de la Sicile (2). Il faisait même beaucoup de miracles dans ces deux églises. Mais il ne put empêcher les Sarrasins de s'emparer de la Sicile et de l'île de Lipari. Ces barbares trouvèrent si peu d'obstacles, qu'ils mirent tout en cendres, et brûlèrent sans respect le corps saint. 

    A la vérité, quelques années après, au commencement du neuvième siècle, le corps de saint Barthélemi fut retrouvé par un moine, et porté à Bénévent, où les prodiges recommencèrent. Dans le onzième siècle, l'empereur Othon III trouvant ce corps trop précieux pour les Bénéventins, l'emmena à Rome, et fit bâtir en l'honneur du saint apôtre une église dans l'île du Tibre, qui s'appelle maintenant île de Saint-Barthélemi. 

    Cependant les Bénéventins prétendent qu'ils ont donné à l'empereur Othoft un faux corps, et qu'ils ont conservé le véritable. Les Romains répliquent à cela que leur corps de saint Barthélemi est le véritable, puisqu'il fait des miracles. Les Bénéventins opposent des prodiges non moins éclatants ; de façon qu'il est impossible à tout esprit pieux de ne pas reconnaître que saint Barthélemi a au moins deux corps, si celui de Dara est perdu. 

    Outre ces deux corps très-complets, on montre dans une multitude d'églises différentes pièces de saint Barthélemi. La cathédrale de Cantorbéry possédait son cinquième ou septième bras. Le huitième était à Béthune en Artois. On voit à Pise une neuvième main du même saint. On montrait un de ses doigts à Saint-Denis, un autre à Fréjus, d'autres en beaucoup d'autres lieux. 

    Comme on conta que saint Barthélemi avait été écorché, on eut aussi l'adresse de trouver sa peau, qui est peut-être encore à Pise, et qui guérit beaucoup de maladies cutanées. 

    Enfin, on eut tant de vénération pour tous les débris de ce grand saint, que l'on montrait à Trèves, en Allemagne, son membre viril (1). Quelques-uns prétendent que ce même membre fut longtemps double, parce qu'on le possédait aussi à Augsbourg. Il était d'une taille extraordinaire, et avait la propriété de faire faire des enfants aux femmes. La plupart de ces saintes reliques sont maintenant égarées.  

    (1) Calviu. Traité des Reliques. Voyez dans ce Dictionnaire l'article de Saint Guignolé.  

    DEUX MIRACLES DU CORPS DE SAINT BARTHÉLEMI,
    Tires de la Légende dorée : Legenda 118.
     

    « Lorsque l'empereur Frédéric détruisait les églises de Bénévent, un de ses satellites aperçut à l'écart une petite troupe de graves personnages, vêtus de blancs, et très-occupés à discuter ensemble. Il s'en approcha et leur demanda qui ils étaient. On lui répondit : C'est saint Barthélémi, avec les autres saints dont les reliques sont honorées dans cette ville. L'homme se prosterna et comme il était curieux, il écouta ce qu'ils disaient. 

    » Après avoir longtemps disputé sur la peine que méritait celui qui les avait chassés de leurs églises, les bons saints convinrent qu'il fallait le tuer sans plus de retard, et l'envoyer rendre compte de sa conduite au tribunal de Dieu. Après cela, ils se séparèrent ; et au bout de quelques jours l'empereur Frédéric mourut misérablement. » 

    « Un docteur en théologie fêtait saint Barthélemi toute l'année, et avait grande vénération pour ses reliques. Un jour qu'il prêchait, le diable vint à son sermon sous la figure d'une jeune fille extrêmement belle. Le docteur jeta les yeux sur elle, la trouva à son gré et l'invita à dîner. 

    » Lorsqu'ils furent à table, la prétendue pucelle lança des œillades si amoureuses à son hôte qu'il commença de s'enflammer. Mais tout à coup saint Barthélemi, habillé en pèlerin, vint frapper à la porte, et demanda l'hospitalité. La prétendue jeune fille ne parut pas d'avis de recevoir un tiers , et le docteur se contenta d'envoyer un croûton au pèlerin. 

    » Saint Barthélemi le refusa, et fit demander au docteur de lui dire ce qu'il trouvait de particulier dans l'homme.— C'est qu'il rit, répondit le docteur. — C'est la manière dont il engendre, répondit la pucelle. 

    » Saint Barthélemi dit : — Le docteur a bien répondu ; mais la demoiselle est plus profonde. Qu'on me dise aussi quel est l'espace d'un pied qui renferme les plus miraculeux objets de la création. — C'est le trou de la croix, répondit le docteur. — C'est la tête humaine, répondit la jeune fille. 

    » A merveille tous les deux, dit saint Barthélemi. Je n'ai plus qu'une question à vous proposer : quelle distance y a-t-il du ciel aux enfers? — Je n'en sais rien, dit le docteur. — Hélas! Je le sais bien, moi, dit la jeune fille ; j'en ai fait le voyage, et je sens qu'il faut y retomber. 

    » Aussitôt le diable reprit sa forme peu gracieuse et disparut en hurlant. Le docteur, épouvanté, chercha son pèlerin ; mais il ne trouva personne; et se doutant du miracle, il alla brûler un cierge devant le corps de saint Barthélemi. » 

    Saint André garantit, par un moyen tout semblable, un évêque qui s'allait coucher avec une jeune pèlerine (1). 

    D'une Dent De Saint Barthélemi.  

    Une recluse des environs d'Aix-la-Chapelle, au douzième siècle, possédait une dent de saint Barthélemi et quelques autres reliques. Un prêtre qui lui disait des messes lui demanda cette dent, qu'elle refusa. Eh bien! dit le prêtre, si vous ne m'en donnez au moins la moitié, je ne viendrai plus vous voir. La recluse embarrassée hésita un moment entre cette menace et l'amour qu'elle portait à sa dent. Il paraît qu'elle n'aimait pas moins le prêtre, car elle finit par consentir à lui en donner la moitié. Mais le prêtre n'eut pas plus tôt essayé de couper la dent avec son couteau, qu'il en sortit du sang, comme si saint Barthélemi eût vécu encore dans sa dent. Le pauvre prêtre épouvanté laissa à la recluse son joyau entier, et se contenta de le toucher quelquefois en venant lui dire la messe. Césaire de Oteaux assure qu'il a vu de ses yeux cette miraculeuse dent du saint apôtre écorché (2). 

    (1) Eusèbe, Histoire ecclésiastique, livre5 , chap. 10.' (a) Grégoire de Tours, Miracul., etc. lib. I, cap. 34. Tillemont, Mémoires ecçlés., tome I.

    (1) On peut voir le mélodrame de saint André, dans le Diable peint par lui-même, chap. xxvi. (a) Aliracut, Catsarii, lib. vin , cap. 4'>. 

    Extrait de Critique des reliques et des images miraculeuses par J.-A-S. Collin de Plancy. Tome Premier, Paris Guien et Compagnie, Libraires, Bd Montmartre 1821.  

     

    BAYEUX :

    Concernant ce saint, voir aussi l’article ci-après extrait de : Les saints dans la Normandie médiévale – colloque de Cerisy-la-Salle, 1996 ; Presses Universitaires de Caen, 2000. Chapitre : “ Les reliques de la cathédrale de Bayeux ” par F. Neveux.

     

    RECULEY (Le) / JUHAYE-MONDAYE :  

             "Une autre fontaine Saint-Barthélemy existait dans l'enclos de l'ancien presbytère de Le Reculey ; son eau "passait" pour guérir les "fièvres pernicieuses".

    in "Saints guérisseurs, saints imaginaires, dévotions populaires" par Jean Seguin, 1929, rééd. Lib. Guénégaud Paris 1978.

     

             “ Saint Barthélemy est l'un des douze apôtres (également donné sous le nom de Nathanaël). Il aurait été martyrisé sous le règne du roi Astrage, en Arménie. Son supplice fut particulièrement cruel. Il fut écorché vif, puis crucifié les pieds en bas. Son culte s'est répandu dans toute la Normandie, mais saint Barthélemy n'est que rarement connu comme guérisseur. Toutefois, dans l'Orne, près d'Ecouché, à Avoine, on a longtemps invoqué le saint en faveur des enfants que l'on plaçait alors sous sa protection. Le pèlerinage s'est éteint, mais les sollicitations individuelles ont‑elles pour autant disparu totalement ? On peut se poser le même type de question à propos de la fréquentation de la fontaine Saint-­Barthélemy du Reculey (canton de Bény-Bocage) dont l'eau avait la réputation de venir à bout des fièvres tenaces. On sait qu'une fontaine Saint‑Barthélemy eut une grande importance dès le XIIIe siècle à Juhaye‑Mondaye (canton de Balleroy). Les moines de l'abbaye s'y ravitaillaient et son eau avait la réputation de secourir les lépreux. Et tous ceux qui souffraient de maladies de peau en usaient. il semble qu'au siècle dernier, les visites n'avaient pas cessé. Le docteur Jean Fournée, éminent spécialiste du culte des saints, cite la fontaine de Juhaye‑Mondaye comme fréquentée pour la guérison des “affections de la peau ”.

    in Les saints qui guérissent en Normandie, tome 2, d'Hippolyte Gancel, éditions Ouest France, 2003.


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