• MEEN

    MEEN ou MAIN, MEVEN, MAINE, MEWAN

    Né vers 540 - Mort en 617 : Gallois, disciple de Saint Samson, fondateur d'une abbaye à Gaël près de la forêt de Brocéliande, qui est transférée au lieu qui porte son nom : Saint Méon. Son culte est souvent associé à une fontaine ou à une source. Fête : 21 juin. 

     

    GLANVILLE :

    “ Lavoir, vers le XIXe siècle, en bois : Le lavoir constituait un lieu de convivialité où les femmes venaient laver leur linge et bavarder. Celui de Glanville est alimenté par deux sources, Saint-Marcouf et Saint-Méen. Saint Marcouf est invoqué pour les affections de la peau. Son culte en France remonte aux invasions normandes, après la translation de ses reliques à Corbeny, dans le diocèse de Laon. Après leur sacre et au cours d'une neuvaine, les rois de France lui rendaient grâce du don qu'ils avaient reçu de guérir les écrouelles. ”

    in Le Patrimoine des Communes du Calvados, Flohic éditions 2001.

     

    “ Dans le Calvados, les pèlerins peuvent aller ‑comme indiqué ci‑avant‑ à Glanville (canton de Pont‑l'Evêque) où la source Saint-­Méen débite une eau censée guérir les dermatoses. Ils peuvent se rendre à Pont-­l'Evêque où, dans l'église Saint‑Melaine, une statue lui est accordée (en fait, il s'agit de saint Barthélemy, peau sur le bras). L’église est fermée, mais, selon les témoins locaux, il suffit aux pèlerins de poser une main sur la porte du sanctuaire en priant le saint pour être entendu. A Rouvres (canton de Bretteville‑sur‑Laize), on honore dans sa chapelle un saint appelé “ Main ” par confusion avec un mal qu'il était censé guérir. Il s'agit de saint Méen. ”

    in Les saints qui guérissent en Normandie, tome 2, d'Hippolyte Gancel, éditions Ouest France 2003.

     

    Saint-Méen, du Pré d'Auge, guérisseur de la Lèpre (1913).

     

    Sub quœrcus pede limpidus
    Quo mundatur humor fœdus
    Fons illi consecratur (1).


    Les Saints guérisseurs du Calvados ! Combien n'en compterait-on pas : Saint-Clair, d'Hérouville ; Saint-Ursin de Lisieux, qui préserve des fièvres ; Saint-Roch, à Vimont et tailleurs qui écarte la peste et guérit des plaies ; Saint-Siméon et sa fontaine à Sainte-Honorine-des-Pertes, Saint-Laurent de Glos et de la Pommeraye pour les brulures, Saint-Hildevert de la Pommeraye pour les coliques, Saint-Juste de Fervaques qui guérit les enfants de la peur, Sainte-Apolline à Manerbe pour les maux de dents. Jusqu'aux pèlerinages à Courcy où l'on met dans les chaînes les enfants tardifs à marcher, à Louvigny pour la guérison du carreau, ou Ouville-la-Bien-Tournée, démarche propice à un heureux accouchement, etc.

    Cependant l'un des plus généralement connus et à l'intercession duquel ont le plus souvent recours les mamans affolées par les gourmes, les acnés rebelles, les croûtes ou les pustules qui défigurent le cher visage de leurs petits, c'est Saint-Méen, dont l'effigie est vénérée au Pré-d'Auge et dont la fontaine est au but de pèlerinage très fréquenté.


    EN matière de choses surnaturelles ou simplement inconnues dont l'explication gênante ne s'accommode point de nos piètres raisonnements, il est immanquable qu'il se mêle à l'exposé des faits une part de merveilleux qui bientôt élimine le reste. De tout temps la Légende a suppléé aux lacunes de l'Histoire, quand elle ne s'y est point amalgamée d'une façon réfractaire à toute analyse. Chose admirable, et qui témoigne du désir de foi à des œuvres plus grandes que les œuvres humaines, à des puissances supérieures à nos forces limitées, lorsque la vérité simple et l'hypothèse surnaturelle se sont présentées ensemble, sans hésiter c'est l'hypothèse qu'on a voulu croire et la légende qu'on a tenue pour certaine. C'est ainsi que des réalités prosaïques ont disparu à jamais oubliées, tandis que les contes et les mythes populaires transmis de la bouche de l'aïeule à l'oreille de l'enfant, sont demeurés intacts et plus vivants que jamais.

    Dans l'épopée divine du Christ, le peuple fut plus volontiers conquis par les miracles du thaumaturge que par les paroles réformatrices du sauveur : à Roncevaux le dévouement de Roland s'efface devant le coup d'épée de Durandal et la prodigieuse sonnerie de l'olifant ; Jeanne d'Arc, sans ses voix n'eût pas été complète. Lorsque la foi religieuse vient à être entamée par le scepticisme des siècles, s'il n'est plus possible de découvrir aux héros des accointances divines, la postérité s'empare des gestes ou des mots qui lui semblent admirables, les complète, les magnifie, puis charge sa tradition orale de perpétuer mieux que par le marbre ou le bronze, le souvenir de ces hauts faits où il entre un peu de vérité et beaucoup d'imagination.

    Il serait donc contraire à la règle que Saint-Méen, n'eût pas sa légende à côté de son histoire, d'ailleurs glorieuse et que la première ne fut pas de beaucoup plus et mieux connue que la seconde.

    Aussi bien, malgré la biographie du Saint par le dominicain Albert le Grand, les notes éparses dans les Bollandistes, le récent ouvrage de M. l'abbé H. Chasles (2) et les articles de l'excellent abbé Lefèvre, curé du Pré-d'Auge, dans son Bulletin paroissial en est-il ainsi et la légende de Saint-Méen et de sa fontaine miraculeuse prévaudra-t-elle longtemps, toujours sans doute, sur les autres mérites de l'abbé de Saint-Jean de Gaël.

    Voici donc cette légende, la légende dorée qui ne cite point d'auteurs et ne fournit pas de preuves, mais qui affirme avec l'autorité de treize siècles de tradition.

    *
    * *


    Le Chêne et la Fontaine miraculeuse Saint-Méen se trouvait à passer par le Val du Pré-d'Auge. Fatigué d'un long voyage il s'étendit au pied d'un chêne et se reposait lors que survinrent deux jeunes filles qui remontaient la pente portant sur leurs épaules des cruches pleines.

    L'abbé les arrêta au passage et leur demanda un peu d'eau pour étancher sa soif et laver les pustules qui couvraient son visage.

    L'une qui était assure-t-on, et nous le croyons sans peine, car la beauté est bonne, petite, laide, revêche, et sans pitié, lui tourna le dos et s'enfuit d'un air méprisant. L'autre, de taille moyenne, svelte et distinguée comme une damoiselle, s'approcha souriante du vieillard et déposa à ses pieds sa cruche de terre. Saint-Méen remplit sa gourde et dit à la compatissante jeune fille : « Désormais, pour épargner vos pas, vous viendrez puiser l'eau à la source qui va jaillir ici-même sous cette chesnaie : quant à votre compagne elle est déjà atteinte de la lèpre et après avoir vainement essayé tous les remèdes elle devra venir se laver à cette source si elle veut guérir ».

    Et il en fut ainsi de tous points. La vertu miraculeuse de la source fut bientôt connue et depuis on n'a pas cessé d'en faire usage ni de prier St-Méen pour obtenir la guérison des maladies de la peau.

    *
    * *



    Voyons à présent l'histoire.

    Saint Méen que l'on trouve ordinairement désigné sous les noms de Conard Méen, et de Saint-Méven, du latin Mevennus,naquit vers 540 d'une famille riche et noble de la province de Givent dans le South-Wales. Il était, croit-on, parent de Saint-Magloire et de Saint-Samson par sa mère.

    Il passa en Armorique et y prêcha l'Evangile avec beaucoup d'édification et de fruit. Le comte Caduon et Guerech Ier, comte de Vannes, l'accueillirent avec faveur et lui facilitèrent la fondation de l'abbaye de Saint-Jean Baptiste de Gaël, sur les bords de la rivière Men, au diocèse de Saint-Malo à environ 9 lieues de Rennes.

    Etabli abbé vers 570 par Saint-Samson, Conard Méen maintint toujours une règle stricte parmi ses religieux : ce fut lui qui donna l'habit à Judicaël, roi de Domnonée, lorsqu'attiré par la vie monastique celui-ci quitta le monde pour se consacrer à Dieu dans la 22e année de son âge.

    L'abbé fonda un second monastère près d'Angers.

    Il mourut en odeur de sainteté vers l'an 617. Son tombeau se trouve avec celui de l'abbé de Coëtlogon, dans l'abbaye de Saint-Jean de Gaël qui s'appelle aujourd'hui de Saint-Méen.

    On voit aussi dans ce monastère une fontaine miraculeuse qui guérissait de la terrible lèpre que les anciens auteurs qui ont écrit sur la médecine, désignent couramment sous le nom de mal de Saint-Méen.

    Le nombre et l'éclat des miracles qui s'accomplirent à cette fontaine et à son tombeau le firent honorer dès le VIIe siècle dans les litanies anglaises. Il était aussi nommé dans le missel dont l'église d'Angleterre se servait avant la conquête des Normands.

    A l'époque où nos ancêtres apparurent sur les rivages de la Manche les reliques du Saint furent portées à l'abbaye de Saint-Florent, près de Saumur ; il en est cependant demeuré une portion dans le monastère qu'il fonda.

    Sa fête est désignée comme solennelle à la date du 21 juin, dans les calendriers de la plupart des diocèses de Bretagne.

    Saint-Méen est honoré d'une façon particulière en de nombreux endroits ; l'église de Tremeven près Lanvollon (Côtes-du-Nord) lui est dédiée et sa statue se trouve dans les églises de Saint-Maurice à Salins (Jura) celle-ci très ancienne, de la Chapelle-Biche, près Flers, etc... Son culte est aussi en grande vénération depuis prés de deux cents ans dans l'église de Hattenville près de Fauville-en-Caux.

    *
    * *

     

    Le Val Saint-Méen 


    Tout cela ne nous dit pas à quelle occasion Saint-Méen serait passé au Pré d'Auge et y aurait manifesté sa puissance curatrice.

    Bien que rien de précis ne l'affirme, on peut tenir la version suivante pour vraisemblable.

    Saint-Samson, oncle de Saint-Méen, était évêque de Dol et son diocèse possédait une exemption à l'embouchure de la Risle (Eure).

    Ce serait en se rendant à cette exemption que Conard Méen aurait traversé notre pays. Son séjour se trouve confirmé par une appellation que l'on entend souvent accolée à son nom " Saint-Méen-de-Grestain ". Or Grestain se trouve précisément sur les bords de la Seine près de l'embouchure de la Risle.

    S'imagine-t-on les théories de lépreux, rongés du terrible mal qui durent accourir durant le Moyen-Age au val Saint-Méen, près de la fontaine salvatrice ; les regards de ferveur désespérée qui s'élevèrent vers l'effigie du bon abbé, conservée à l'église, ou vers celle qu'abrite le chêne sous lequel jaillit la source !

    Aujourd'hui, l'intercession du Saint est demandée pour des maux moins affligeants, affections de la peau toujours, mais qui se réduisent le plus souvent aux gourmes rebelles des enfants.

    La démarche préliminaire à tout pèlerinage d'un malade à Saint-Méen était et est encore, la quête du prix de la messe par la mère de l'enfant ou l'un de ses proches : cet argent devait être reçu dans une bourse ou une coupe et ne pas être touché des doigts du sollicitant.

    Dans une ordonnance du 27 octobre 1873, Mgr Hugonin, évêque de Bayeux, fixait à 2 francs 10 le prix d'une messe particulière pour les pèlerins et à 0 franc 50 la participation à une messe hebdomadaire célébrée, le jeudi à 9 heures à leur intention. Il interdisait au curé de la paroisse de se charger d'aucune neuvaine, et laissait libre la fourniture des cierges et la récitation des évangiles. Toutefois le digne évêque rappelait aux pèlerins « que toutes ces pratiques excellentes en elles-mêmes ne sont pas cependant nécessaires et obligatoires pour obtenir les grâces qu'ils sollicitent, mais que le succès de leur pèlerinage dépend surtout des bonnes dispositions de leur cœur, de la pureté de leur intention, de la ferveur de leur prière et de la bonté miséricordieuse de Dieu ».

    Touchante église aux lignes chancelantes et disproportionnées qui ne sont pas sans charme, paysage mouvementé comme une toile de maître, pittoresque auberge des pèlerins, grands arbres entourant le vieux manoir seigneurial, rien ne manque au val Saint-Méen pour en faire un endroit insigne et digne d'un multiple intérêt. L'église renferme un tableau de Saint-Sébastien par Lehman, une pietà en pierre et bois fort belle, un christ en terre cuite, œuvre naïve des anciens potiers, des tableaux curieux ; les tombes seigneuriales de Ch. de la Rivière et de J. de Monney... les pierres extérieures retournées lors d'une réédification gardent la trace des fresques qui ornaient la chapelle du Rosaire où pria Dom Georges, abbé Val-Richer, qui fut curé du Pré-d'Auge.

    Pieta dans l'église du Pré-d'AugeL'église du Pré-d'Auge 


    NOTES :
    (1) Hymne de Saint-Méen : Au pied d'un chêne une source limpide lui est consacrée, où l'humeur viciée est purifiée.
    (2) Aumônier à Saint-Laurent de Rennes.

    http://www.bmlisieux.com/normandie/revlex01.htm

     

     

    PONT-L'ÉVÊQUE :  

             A l'église Saint-Mélaine : "La vieille statue en couleurs de Saint Méen dit le "Fleureux" fait encore l'objet de pèlerinages ; elle est en effet invoquée contre les maladies infantiles, et reçoit en offrande des épingles et des langes de nourrissons. La source Saint-Méen coule près de l'église et débouche sur son contrebas, mais elle est à présent sous clef, canalisée par une pompe ; ses propriétés, comme celles de nombreuses sources du Pays d'Auge, sont dermatologiques et reconnues comme telles à l'unanimité."

    in "Pont l'Evêque" de Francoise Schnerb, Editions Ouest France 1977.

     

    LE PRE D'AUGE :  

             Le Pré-d'Auge devait sa réputation à son industrie de céramique, pavages vernissés et épis de faitage qui ornent encore beaucoup de manoirs augerons. Il existait autrefois, chaque été, au Pré-d'Auge, un pélerinage à la source Saint-Méen. Située en contrebas du château et de l'église, la fontaine attire beaucoup de pélerins venus demander au Saint la guérison de maladies de la peau dont sont affligés parfois certains nourrissons. Elle s'écoule vive et abondante au pied d'un vieux chêne échevelé. Un modeste oratoire a été aménagé dans le creux de l'arbre autour duquel pendent en toutes saisons de nombreux morceaux de tissus, autant d'ex-votos à la supplication des intercessions de saint Méen, surnommé jadis le "crouteux".

     

             "En dehors du Bocage, dans une paroisse des environs de Lisieux, la statuette de St Méen, abritée dans une petite niche creusée au tronc d'un vieux chêne, est le but de nombreux pélerinages. Il n'est pas un jour où l'on ne voie une mère, agenouillée au pied de l'arbre vénéré, élever vers l'image du bon saint son enfant malade, et lui demander avec une anxieuse ferveur son intercession toute-puissante pour la guérison du pauvre petit être. Après les effusions du coeur, les ablutions obligées, l'eau d'une fontaine voisine, puisée avec la main, sert à laver l'enfant sur toutes les parties malades du corps, et la mère n'oublie pas d'en emporter une petite provision qui servira au même usage durant neuf jours et dont elle lui en fera prendre neuf cuillerées. Après de nouvelles prières devant le bienheureux, elle allume un cierge devant la statuette, et attache au grillage de 1a niche un bouquet ou une image pieuse en signe de reconnaissance. Quand l'enfant ne peut être transporté, la mère ou celle qui la remplace se lave, dans 1a fontaine, la tête et le corps aux endroits où l'entant est malade."

    in Esquisses du Bocage Normand de Jules Lecoeur (1883).

     

             Cette source a sa légende : "Lors d'un de ces voyages en Normandie, Saint Méen trouva dans un vallon du Pays d'Auge un lieu de repos. Un jour il vit cheminer vers lui, venant d'une source située au bas de la colline, deux fillettes portant chacune une cruche remplie d'eau. Saint Méen leur demanda un peu de cette eau pour se rafraîchir. L'une des filles refusa nettement et s'éloigna pendant que l'autre, au contraire, posa sa cruche près du saint pour qu'il puisse remplir sa gourde. Le saint la remercia et lui dit : Pour épargner votre peine de faire un si long chemin afin de vous procurer de l'eau, vous viendrez la prendre à la source qui va jaillir ici sous ce chêne. Et frappant le sol de son bâton, l'eau se mit à s'écouler. Il rajouta : Quant à votre camarade atteinte de la lèpre elle devra si elle veut guérir, laver ses plaies avec l'eau de cette source. Depuis ce temps la tradition s'établit des vertus de l'eau de la source du Pré-d'Auge pour la guérison des maladies de peau."

    in Légendes de Basse-Normandie par E. Colin (1992).

     

             "Gallois et noble d'origine, saint Méen, disciple de saint Samson, fit partie d'un groupe de religieux qui quittèrent leur pays sous la poussée des envahisseurs saxons. Ils passèrent la mer pour s'installer en Armorique d'où ils partirent évangéliser ce qui devait devenir la Normandie. Méen fit un séjour à Jersey avant de s'installer en Armorique où il fonda un monastère. Cette communauté fut transférée par la suite dans un endroit auquel il donna son nom, l'actuel Saint-Méen-le-Grand. Il mourut le 21 juin 617. Aussitôt, des foules, venant souvent de très loin, accoururent près du tombeau, attirées par les miracles qu'on attribuait au saint. La dispersion des reliques entraîna une dispersion des lieux de culte. Il faut dire que saint Méen est exclusivement un saint guérisseur. Sa spécialité, les maladies de la peau. Il est vraisemblable qu'il ait d'abord guéri la lèpre. Puis les pèlerins ont demandé toujours plus. Il fut donc appelé à guérir la gale, puis la syphilis. Il faut savoir qu'à cette époque les malades syphilitiques devaient porter soit à leur vêtement, soit à leur chapeau une petite pièce d'étoffe représentant une main. Le hasard fait bien les choses. Un calembour ne tarda pas à s'établir entre "main" et "Méen", prononcés de même façon . Le saint guérissait donc ceux qui portaient la main et, de la même manière, ceux qui souffraient des mains, donc de la gale. De là, par extension, on lui reconnut des pouvoirs de guérison sur les diverses maladies de la peau. Saint Méen est très populaire dans toute la Normandie. (...) Dans le Calvados, le principal lieu de culte se situe au Pré-d'Auge (canton de Lisieux). Une source coule au flanc d'un coteau, au pied d'un énorme chêne. Il y a quelques années, un orage a détruit largement le sommet de l'arbre. Mais le gros du tronc, creusé par les ans, renferme une statuette de saint Méen protégée par une grille. Les malades viennent en grand nombre soigner leurs problèmes dermatologiques à cette source. Ils prient, lavent les parties malades et suspendent les linges aux aspérités du tronc de l'arbre, ce qui constitue un étalage peu commun. Parfois, des ex-voto tels que des chapelets y sont aussi accrochés."

    in Les saints qui guérissent en Normandie d'Hippolyte Gancel, éditions Ouest France 1998.

            

    “ Le chêne Saint-Méen : Cet arbre millénaire témoigne, par les nombreux linges dont il est couvert, de l'importance du culte de saint Méen. Il renferme une statuette en pierre du saint. Incendié en juin 1994, le chêne est fortement endommagé mais abrite toujours le saint qui avait été retiré de sa niche juste avant les faits. La commune a planté un nouveau chêne qui prendra la relève dans quelques années. (Cl. M. H. 1943)

             La fontaine Saint-Méen, XIXe ou XXe siècle en pierre : De passage dans le pays d'Auge, saint Méen se serait arrêté sous un chêne et aurait demandé de l'eau à deux jeunes filles portant des cruches pleines afin de laver son visage couvert de pustules. Si l'une d'elle passa son chemin, l'autre lui tendit sa cruche. Saint Méen dit alors : “ Désormais, pour épargner vos pas, vous viendrez puiser l'eau à cette source qui va jaillir ; votre compagne est atteinte de la lèpre, sil elle veut guérir, elle devra venir se laver à cette source ”. Très important au siècle dernier, le culte à saint Méen, prié pour la guérison des eczémas, est toujours actif. Le malade vient se laver le visage à la fontaine ou accroche un linge sur l'arbre avant d'aller prier à l'église. (CI M. H. 1943) ”

    In Le Patrimoine des Communes du Calvados, éditions Flohic 2001.

     

    « Saint-Méen, du Pré d'Auge, guérisseur de la Lèpre (1913).

    Saint-Méen, du Pré d'Auge, guérisseur de la Lèpre

     

    Sub quœrcus pede limpidus
    Quo mundatur humor fœdus
    Fons illi consecratur (1).


    Les Saints guérisseurs du Calvados ! Combien n'en compterait-on pas : Saint-Clair, d'Hérouville ; Saint-Ursin de Lisieux, qui préserve des fièvres ; Saint-Roch, à Vimont et tailleurs qui écarte la peste et guérit des plaies ; Saintt-Siméon et sa fontaine à Sainte-Honorine-des-Pertes, Saint-Laurent de Glos et de la Pommeraye pour les brulûres, Saint-Hildevert de la Pommeraye pour les coliques, Saint-Juste de Fervaques qui guérit les enfants de la peur, Sainte-Apolline à Manerbe pour les maux de dents. Jusqu'aux pèlerinages à Courcy où l'on met dans les chaînes les enfants tardifs à marcher, à Louvigny pour la guérison du carreau, ou Ouville-la-Bien-Tournée, démarche propice à un heureux accouchement, etc.

    Cependant l'un des plus généralement connus et à l'intercession duquel ont le plus souvent recours les mamans affolées par les gourmes, les acnés rebelles, les croûtes ou les pustules qui défigurent le cher visage de leurs petits, c'est Saint-Méen, dont l'effigie est vénérée au Pré-d'Auge et dont la fontaine est au but de pèlerinage très fréquenté.


    EN matière de choses surnaturelles ou simplement inconnues dont l'explication gênante ne s'accommode point de nos piètres raisonnements, il est immanquable qu'il se mêle à l'exposé des faits une part de merveilleux qui bientôt élimine le reste. De tout temps la Légende a suppléé aux lacunes de l'Histoire, quand elle ne s'y est point amalgamée d'une façon réfractaire à toute analyse. Chose admirable, et qui témoigne du désir de foi à des œuvres plus grandes que les œuvres humaines, à des puissances supérieures à nos forces limitées, lorsque la vérité simple et l'hypothèse surnaturelle se sont présentées ensemble, sans hésiter c'est 1'hypothèse qu'on a voulu croire et la légende qu'on a tenue pour certaine. C'est ainsi que des réalités prosaïques ont disparu à jamais oubliées, tandis que les contes et les mythes populaires transmis de la bouche de l'aïeule à l'oreille de l'enfant, sont demeurés intacts et plus vivants que jamais.

    Dans l'épopée divine du Christ, le peuple fut plus volontiers conquis par les miracles du thaumaturge que par les paroles réformatrices du sauveur : à Roncevaux le dévouement de Roland s'efface devant le coup d'épée de Durandal et la prodigieuse sonnerie de l'olifant ; Jeanne d'Arc, sans ses voix n'eût pas été complète. Lorsque la foi religieuse vient à être entamée par le scepticisme des siècles, s'il n'est plus possible de découvrir aux héros des accointances divines, la postérité s'empare des gestes ou des mots qui lui semblent admirables, les complète, les magnifie, puis charge sa tradition orale de perpétuer mieux que par le marbre ou le bronze, le souvenir de ces hauts faits où il entre un peu de vérité et beaucoup d'imagination.

    Il serait donc contraire à la règle que Saint-Méen, n'eût pas sa légende à côté de son histoire, d'ailleurs glorieuse et que la première ne fut pas de beaucoup plus et mieux connue que la seconde.

    Aussi bien, malgré la biographie du Saint par le dominicain Albert le Grand, les notes éparses dans les Bollandistes, le récent ouvrage de M. l'abbé H. Chasles (2) et les articles de l'excellent abbé Lefévre, curé du Pré-d'Auge, dans son Bulletin paroissial en est-il ainsi et la légende de Saint-Méen et de sa fontaine miraculeuse prévaudra-t-elle longtemps, toujours sans doute, sur les autres mérites de l'abbé de Saint-Jean de Gaël.

    Voici donc cette légende, la légende dorée qui ne cite point d'auteurs et ne fournit pas de preuves, mais qui affirme avec l'autorité de treize siècles de tradition.

    http://www.bmlisieux.com/images/stmeen02.jpgSaint-Méen se trouvait à passer par le Val du Pré-d'Auge. Fatigué d'un long voyage il s'étendit au pied d'un chêne et se reposait lors que survinrent deux jeunes filles qui remontaient la pente portant sur leurs épaules des cruches pleines.

    L'abbé les arrêta au passage et leur demanda un peu d'eau pour étancher sa soif et laver les pustules qui couvraient son visage.

    L'une qui était assure-t-on, et nous le croyons sans peine, car la beauté est bonne, petite, laide, revêche, et sans pitié, lui tourna le dos et s'enfuit d'un air méprisant. L'autre, de taille moyenne, svelte et distinguée comme une damoiselle, s'approcha souriante du vieillard et déposa à ses pieds sa cruche de terre. Saint-Méen remplit sa gourde et dit à la compatissante jeune fille : « Désormais, pour épargner vos pas, vous viendrez puiser l'eau à la source qui va jaillir ici-même sous cette chesnaie : quant à votre compagne elle est déjà atteinte de la lèpre et après avoir vainement essayé tous les remèdes elle devra venir se laver à cette source si elle veut guérir ».

    Et il en fut ainsi de tous points. La vertu miraculeuse de la source fut bientôt connue et depuis on n'a pas cessé d'en faire usage ni de prier St-Méen pour obtenir la guérison des maladies de la peau.

    Voyons à présent l'histoire.

    Saint Méen que l'on trouve ordinairement désigné sous les noms de Conard Méen, et de Saint-Méven, du latin Mevennus,naquit vers 540 d'une famille riche et noble de la province de Givent dans le South-Wales. Il était, croit-on, parent de Saint-Magloire et de Saint-Samson par sa mère.

    Il passa en Armorique et y prêcha l'Evangile avec beaucoup d'édification et de fruit. Le comte Caduon et Guerech Ier, comte de Vannes, l'accueillirent avec faveur et lui facilitèrent la fondation de l'abbaye de Saint-Jean Baptiste de Gaël, sur les bords de la rivière Men, au diocèse de Saint-Malo à environ 9 lieues de Rennes.

    Etabli abbé vers 570 par Saint-Samson, Conard Méen maintint toujours une règle stricte parmi ses religieux : ce fut lui qui donna l'habit à Judicaël, roi de Domnonée, lorsqu'attiré par la vie monastique celui-ci quitta le monde pour se consacrer à Dieu dans la 22e année de son âge.

    L'abbé fonda un second monastère près d'Angers.

    Il mourut en odeur de sainteté vers l'an 617. Son tombeau se trouve avec celui de l'abbé de Coëtlogon, dans l'abbaye de Saint-Jean de Gaël qui s'appelle aujourd'hui de Saint-Méen.

    On voit aussi dans ce monastère une fontaine miraculeuse qui guérissait de la terrible lèpre que les anciens auteurs qui ont écrit sur la médecine, désignent couramment sous le nom de mal de Saint-Méen.
    Le nombre et l'éclat des miracles qui s'accomplirent à cette fontaine et à son tombeau le firent honorer dès le VIIe siècle dans les litanies anglaises. Il était aussi nommé dans le missel dont l'église d'Angleterre se servait avant la conquête des Normands.

    A l'époque où nos ancêtres apparurent sur les rivages de la Manche les reliques du Saint furent portées à l'abbaye de Saint-Florent, près de Saumur ; il en est cependant demeuré une portion dans le monastère qu'il fonda.

    Sa fête est désignée comme solennelle à la date du 21 juin,dans les calendriers de la plupart des diocèses de Bretagne.

    Saint-Méen est honoré d'une façon particulière en de nombreux endroits ; l'église de Tremeven près Lanvollon (Côtes-du-Nord) lui est dédiée et sa statue se trouve dans les églises de Saint-Maurice à Salins (Jura) celle-ci très ancienne, de la Chapelle-Biche, près Flers, etc... Son culte est aussi en grande vénération depuis prés de deux cents ans dans l'église de Hattenville prés de Fauville-en-Caux.

    Le Val Saint-Méen

    Tout cela ne nous dit pas à quelle occasion Saint-Méen serait passé au Pré d'Auge et y aurait manifesté sa puissance curatrice.

    Bien que rien de précis ne l'affirme, on peut tenir la version suivante pour vraisemblable.

    Saint-Samson, oncle de Saint-Méen, était évêque de Dol et son diocèse possédait une exemption à l'embouchure de la Risle (Eure).

    Ce serait en se rendant à cette exemption que Conard Méen aurait traversé notre pays. Son séjour se trouve confirmé par une appellation que l'on entend souvent accolée à son nom " Saint-Méen-de-Grestain ". Or Grestain se trouve précisément sur les bords de la Seine près de l'embouchure de la Risle.

    S'imagine-t-on les théories de lépreux, rongés du terrible mal qui durent accourir durant le Moyen-Age au val Saint-Méen, près de la fontaine salvatrice ; les regards de ferveur désespérée qui s'élevèrent vers l'effigie du bon abbé, conservée à l'église, ou vers celle qu'abrite le chêne sous lequel jaillit la source !

    Aujourd'hui, l'intercession du Saint est demandée pour des maux moins affligeants, affections de la peau toujours, mais qui se réduisent le plus souvent aux gourmes rebelles des enfants.

    La démarche préliminaire à tout pèlerinage d'un malade à Saint-Méen était et est encore, la quête du prix de la messe par la mère de l'enfant ou l'un de ses proches : cet argent devait être reçu dans une bourse ou une coupe et ne pas être touché des doigts du sollicitant.

    Dans une ordonnance du 27 octobre 1873, Mgr Hugonin, évêque de Bayeux, fixait à 2 francs 10 le prix d'une messe particulière pour les pèlerins et à 0 franc 50 la participation à une messe hebdomadaire célébrée, le jeudi à 9 heures à leur intention. Il interdisait au curé de la paroisse de se charger d'aucune neuvaine, et laissait libre la fourniture des cierges et la récitation des évangiles. Toutefois le digne évêque rappelait aux pèlerins « que toutes ces pratiques excellentes en elles-mêmes ne sont pas cependant nécessaires et obligatoires pour obtenir les grâces qu'ils sollicitent, mais que le succès de leur pèlerinage dépend surtout des bonnes dispositions de leur cœur, de la pureté de leur intention, de la ferveur de leur prière et de la bonté miséricordieuse de Dieu ».

    Touchante église aux lignes chancelantes et disproportionnées qui ne sont pas sans charme, paysage mouvementé comme une toile de maître, pittoresque auberge des pèlerins, grands arbres entourant le vieux manoir seigneurial, rien ne manque au val Saint-Méen pour en faire un endroit insigne et digne d'un multiple intérêt. L'église renferme un tableau de Saint-Sébastien par Lehman, une pietà en pierre et bois fort belle, un christ en terre cuite, œuvre naïve des anciens potiers, des tableaux curieux ; les tombes seigneuriales de Ch. de la Rivière et de J. de Monney... les pierres extérieures retournées lors d'une réédification gardent la trace des fresques qui ornaient la chapelle du Rosaire où pria Dom Georges, abbé Val-Richer, qui fut curé du Pré-d'Auge.

    Pieta dans l'église du Pré-d'AugeL'église du Pré-d'Auge


    NOTES :
    (1) Hymne de Saint-Méen : Au pied d'un chêne une source limpide lui est consacrée, où l'humeur viciée est purifiée.
    (2) Aumônier à Saint-Laurent de Rennes. 

    Revue illustrée du Calvados, 7e année n°8 - Août 1913. »

     

    ROUVRES :

             “ Dans l’église Notre-Dame de Rouvres du XIIIe XIVe et XXe siècles, en calcaire, on trouve une statue de saint Main : Bien que rurale, l'église offre les pro­portions d'une église urbaine. Elle a la parti­cularité d'être formée de deux édifices accolés, l'un comprenant la nef et datant du XIIIe siècle et l'autre, du XIVe siècle, étant composé du massif occidental et du clocher. Selon une disposition peu fréquente, le choeur n'a pas été élevé dans l'alignement de la nef. Le clocher semble imiter celui de l'église Saint‑Pierre à Caen. L’édifice a été touché lors des bombardements de 1944. Dans l'église, une statue de saint Main a été conservée dans une chapelle qui lui est dédiée. Elle avait pour vertu de guérir tous les maux de main. Les représentations de ce saint breton, appelé saint Mêen, sont rares en Normandie. ”

    in Le Patrimoine des Communes du Calvados, Flohic Editions 2001.


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