• PATRICE

    Evêque de Bayeux (Ve siècle?).

     

    BAYEUX :  

             "Cinquième siècle. De Bayeux. Inhumé à Saint-Exupère."

    in Monographie d'un canton type : Canton de Bayeux par E. Michel (1911), Office d'édition & de diffusion du livre d'histoire 1994.

     

    Saint Patrice (24 mai) : Le procès-verbal d'une visite des reliques de la cathédrale de Lisieux en 1055, mentionne les reliques de Saint Patrice, évêque et confesseur. Il ne peut s'agir, comme plusieurs l'ont prétendu, de saint Patrice d'Irlande, inhumé en l'église Sainte-Trinité de Douvre, où son corps ne fut retrouvé qu'en 1185. La tradition d'un saint Patrice, évêque de Bayeux est, à défaut d'actes authentiques parfaitement établie à partir du XVe siècle. D'après un état des tombeaux de l'église Saint-Exupère, dressé en 1679, le cercueil de saint Patrice reposait alors devant l'autel de la Sainte Vierge. Retrouvé en 1853, la commission n'osa se prononcer sur son authenticité. Les ossements qu'il contenait appartenant à plusieurs individus. Par crainte puérile des dénicheurs de saints, plusieurs évêques de Bayeux, mal informés, n'osèrent conserver l'office de saint Patrice de Bayeux dans le bréviaire diocésain. Cependant les historiens les plus autorisés l'abbé Chastelain dans son martyrologe de 1709, les auteurs du Gallia Christiana, Le Prévost dans son Histoire des saints patrons du diocèse de Lisieux affirment sans hésitation que le saint Patrice de Lisieux est identiquement le même que celui de Bayeux. Aussi Monseigneur Didiot a rendu à son antique prédécesseur la place qui lui appartenait dans le propre du diocèse. Saint Patrice naquit de parents fortunés dans le faubourg de Bayeux, qui porte maintenant son nom. Il transforma en église la maison paternelle et donna tous ses biens à la cathédrale, où furent fondés les prébendes canoniales de Saint-Patrice et de Vaucelles. Il est vraisemblable, sinon certain, que saint Patrice fut inhumé dans la crypte de Saint-Exupère auprès de ses prédécesseurs. Survinrent aux IXe et Xe siècles les invasions des Normands. Pour les soustraire à la profanation, le clergé emporta ses reliques qui furent après quelques pérégrinations déposées en la cathédrale de Lisieux, qui les posséda jusqu'à la Révolution. L'office de saint Patrice se célèbre le 24 mai dans le diocèse de Bayeux. 

    in Cinquante Saints Normands, étude historique et archéologique de Frédéric Alix ; Société d’Impression de Basse-Normandie, Caen 1933.

     

    "Église St Exupère : La fondation de l'église remonte à une époque très ancienne. Plusieurs des premiers évêques de Bayeux y furent inhumés. L'église actuelle a été remontée au XIXe.

    En 1679 Mr Bier curé de St Exupère, à l'occasion de travaux dans le choeur, étudia les sépultures des saints évêques. Il en trouva 7. Les ossements furent partagés entre diverses personnes afin d'en faire des reliques. On trouve : St Rufinien sous le maître autel, St Manvieu au pied du mur méridional, entre l'autel et la tour ; St Contest, au nord devant l'autel de St Clair; St Patrice, au midi devant l'autel de la Sainte Vierge ; St Gerbold, contre le mur septentrional, entre l'autel et la sacristie ; St Frambold, sous le crucifix ; St Geretrand, proche, à sa gauche.

    Le curé dit aussi s'être procuré les restes de St Regnobert et St Zénon, son diacre qui, ainsi que St Exupère et St Loup furent enterrés dans cette église.

    Le tombeau de St Exupère est sous le maître autel. En 1853, l'abbé E. Le Comte, curé de St Exupère, fit des fouilles dans les caveaux où furent inhumés les premiers chefs de l'église de Bayeux. Cette recherche récente fut couronnée de succès. Une crypte a été construite à cette époque pour recevoir tous ces vénérables restes."

    in Églises et chapelles du Bessin de Dominique Achard ; éditions de Neustrie 1999.


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  • PAUL

    Une commune du Calvados porte ce nom : Saint-Paul-du-Vernay.

     

    BAYEUX :

    Concernant ce saint, voir aussi l’article ci-après extrait de : Les saints dans la Normandie médiévale – colloque de Cerisy-la-Salle, 1996 ; Presses Universitaires de Caen, 2000. Chapitre : “ Les reliques de la cathédrale de Bayeux ” par F. Neveux.


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  • PÉRÉGRIN

    Saint patron des malades du cancer et des longues maladies qui a vécu XIVe siècle en Italie

     

     

    Saints guérisseurs et fontaines miraculeuses, en pays d'Auge, les pèlerinages à saint Méen ou à saint Clair continuent d'être prisés. Près d'Orbec, on vient de bénir la statue de saint Pérégrin.

    Reportage

    « J'ai un proche atteint d'un cancer du foie, confie cette dame, en déposant un lumignon au pied de l'autel. Je prie pour lui, pour qu'il supporte la douleur et qu'il y ait un miracle. » Nous ne sommes pas à la basilique de Lisieux, auprès des reliques de sainte Thérèse, mais dans la petite la chapelle du Christ-Roi, à Saint-Denis-de-Mailloc, près d'Orbec. Un lieu bien connu dans le département, car cette chapelle a été construite par l'abbé Noury, qui fut en son temps curé, maire et guérisseur. Au pied de la statue, restaurée, de saint Pérégrin, il y a affluence.

    Qui ça ? Saint Pérégrin, le saint patron des malades du cancer et des longues maladies. Un saint qui a vécu XIVe siècle en Italie et qui a été élevé au rang de saint guérisseur parce qu'« atteint d'une tumeur cancéreuse à la jambe ou d'une gangrène, il fut guéri, alors qu'il dormait, par la main du Christ, explique le frère Noël M. Rath, curé de la paroisse. Si on le prie, c'est pour obtenir la guérison ou tout du moins pour qu'il n'y ait pas de souffrance. »

    La croyance populaire est bien vivante et le recours au pèlerinage et aux fontaines « dites miraculeuses » est monnaie courante.

    Une cinquantaine de fontaines

    Force est de constater qu'en pays d'Auge, où l'on en recense une cinquantaine, la foi que mettaient nos ancêtres les Gaulois, dans les sources et les fontaines, a résisté à 2 000 ans de christianisme. De l'ancienne à la nouvelle religion, ces eaux « qui soignent » ont gagné la protection d'un saint patron...

    Dont le choix pour « telle ou telle maladie repose le plus souvent sur l'homonymie avec le nom du saint », raconte Jack Manoeuvrier, expert en traditions populaires, et auteur d'un ouvrage sur les « Remèdes populaires en Normandie » aux éditions Devoldaere. « Ainsi saint Clair est invoqué pour les maladies des yeux ; sainte Apolline, pour les dents, en souvenir de son martyre, où on lui arracha toutes les dents ; saint Méen, pour la gale, dont on sait qu'elle atteint les mains. »

    La fontaine miraculeuse de saint Méen, derrière l'église du Pré-d'Auge, près de Lisieux, est en soit une curiosité. L'eau qui y coule aurait la vertu de soigner les maladies de peau.

    En plein milieu d'un champ, un gros chêne millénaire offre l'image curieuse d'un épouvantail couvert de linge (!) Sous la protection d'une petite statue de saint Méen, les pèlerins viennent s'y laver et abandonnent le mouchoir ayant servi aux ablutions... dans l'attente de la guérison.

    Anne BLANCHARD-LAIZÉ.   Ouest-France  

    http://www.caen.maville.com/actu/actudet_-la-legende-doree-des-saints-guerisseurs-_4-941495_actu.Htm


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  • PHILIBERT ou PHILBERT 

    Fête le 20 août. Une commune du Calvados porte ce nom : Saint-Philibert-des-Champs.

     

    AUTHIEUX-PAPION – SAINT-PHILIBERT-DES-CHAMPS :

    “ Philbert ou Philibert (latin Philibertus) est né dans le Gers près d'Eauze, pays des Elusates, vers 608. Il suivit des études très sérieuses, subit l'influence des règles extrêmement rigoureuses de saint Colomban et s'appliqua à les transmettre lors de son apostolat en Normandie où il devint le premier abbé de Jumièges qu'il avait fait construire en 655. Après quoi, il entreprit des déplacements en Europe et fonda des monastères ruraux. Un désaccord profond avec l'évêque de Rouen, auquel s'ajoutait un conflit avec le maire du Palais Ebroïn, l'amena à quitter la Normandie. Il partit vers le sud et s'installa à Noirmoutiers. Il fonda un monastère sur place et y mourut en 684. En Normandie, il ne semble plus invoqué que dans le Calvados. Aux Authieux-­Papion (canton de Mézidon‑Canon), l'église placée sous le vocable de saint Philibert (anciennement Philbert) possède une statue du saint. il n'est pas possible d'affirmer que des pèlerins ne viennent plus demander remède à leurs rnaux de ventre. Par ailleurs, le culte serait encore vivant à Saint‑Philibert-des‑Champs (canton de Blangy‑le‑Château) où les invocations porteraient sur les problèmes abdominaux. Les pèlerins peuvent adresser leurs prières au pied de la statue représentant saint Philbert en tenue de pèlerin (de son époque). ”

    in Les saints qui guérissent en Normandie, tome 2, d'Hippolyte Gancel, éditions Ouest France 2003 


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  • PIERRE

    Onze communes du Calvados portent ce nom : Saint-Pierre-Azif, Saint-Pierre-du-Bû, Saint-Pierre-Canivet, Saint-Pierre-sur-Dives, Saint-Pierre-du-Fresne, Saint-Pierre-des-Ifs, Saint-Pierre-du-Jonquet, Saint-Pierre-de-Mailloc, Saint-Pierre-du-Mont, Saint-Pierre-la-Vieille et Saint-Pierre-Tarentaine.

     

    BAYEUX :

    Concernant ce saint, voir aussi l’article ci-après extrait de : Les saints dans la Normandie médiévale – colloque de Cerisy-la-Salle, 1996 ; Presses Universitaires de Caen, 2000. Chapitre : “ Les reliques de la cathédrale de Bayeux ” par F. Neveux.


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  • Bienheureux PIERRE-FRANCOIS JAMET

    Second fondateur du Bon-Sauveur de Caen, amorce de l'actuel Centre Hospitalier Spécialisé (hôpital psychiatrique) ; Décédé en 1844 ; Béatifié par le pape Jean-Paul II le 10 mai 1987. 

     

    CAEN :

             "C'est en plein essor que la communauté du Bon Sauveur est frappée par la Révolution. Le décret du 26 août 1789 ordonnant l'élargissement des pensionnaires de force, et surtout les décrets de février 1790 interdisant les vœux monastiques, et d'avril 1792 supprimant les congrégations religieuses consacrées à l'enseignement et au service des pauvres, auraient du marquer un terme à l'histoire du Bon Sauveur comme ils ont marqué le terme à celle de tant d'autres communautés. Mais c'est à ce moment que l'abbé Jamet entre en scène. Agé de trente ans, il est le confesseur de la Communauté depuis deux ans, et, bien qu'il doive se cacher comme prêtre réfractaire, il va s'employer dans la clandestinité (sous le nom de guerre de Deschamps) a maintenir la cohésion spirituelle de la communauté qui se trouve dispersée dans plusieurs maisons, après avoir été expulsée de la rue d'Auge en 1792. Seules quelques religieuses y demeurent avec une douzaine d'aliénées abandonnées par leurs familles. En 1795, les bâtiments de la rue d'Auge sont vendus et le contingent qui subsistait là va s'installer dans une maison de Mondeville, dans la banlieue de Caen. Peu soucieuses de s'embarrasser de ces aliénées, les autorités municipales ferment les yeux tandis que le père Jamet accomplit d'incessantes navettes entre les maisons. La communauté du Bon Sauveur a été ainsi l'une des seules, sinon la seule, à subsister pendant la Terreur. Certes, Caen n'était guère favorable aux Montagnards et par suite aux "Parisiens". Mais il faut compter aussi avec la question, devenue insoluble, du placement des aliénés. On s'emploie alors à diminuer les effectifs du dépôt de Beaulieu plutôt qu'à les augmenter, le souci d'économie l'emportant d'ailleurs largement sur celui d'humanité. De plus, Beaulieu n'est censé recevoir que les insensés indigents : "Vous m'avez transmis, Citoyens [...] relativement aux difficultés pour subvenir aux dépenses de cette maison.[...] J'ai remarqué que la majeure partie des individus existant au Dépôt de Beaulieu se composait de condamnés au renfermement par les tribunaux, de fous ou folles admis par suite de jugements de leur famille.[...] A l'égard des fous et folles, ceux-là seuls doivent être admis au Dépôt dont les parents sont hors d'état de payer une pension suffisante pour subvenir à leurs besoins ; et les intérêts de la République exigent impérieusement que vous preniez à cet égard des renseignements certains sur les facultés de ces individus, à l'effet de ne pas laisser plus longtemps à sa charge ceux qui par eux-mêmes ou par le secours de leur famille peuvent trouver ailleurs les secours dont ils ont besoin [...]". Cet "ailleurs" ne manque pas de sel au moment où aucune solution d'internement n'existe du fait de la suppression des maisons de force. Voilà qui explique la grande tolérance des autorités à l'égard des soeurs du Bon Sauveur. Il est même probable qu'à partir du Directoire, de nouvelles aliénées sont venus grossir le contingent issu de la rue d'Auge. Dès 1799 en tout cas, alors que les mesures antireligieuses s'estompent, la communauté cherche de nouveaux locaux susceptibles d'agrandissements ultérieurs. C'est bien entendu l'abbé Jamet, sorti d'une clandestinité d'ailleurs relative, qui s'emploie dans cette recherche. Après avoir espéré un moment récupérer la maison de la rue d'Auge puis visité toutes sortes d'emplacements finalement impropres à l'implantation d'un asile, il acquiert en 1804 pour ses protégées, après toute une gymnastique financière, la maison conventuelle fort délabrée des Capucins, sise dans la rue du même nom (actuelle rue Caponière). "Voilà donc un lieu, écrivent les religieuses, où nous pourrons vivre selon notre règle ; une maison qui sera pour nous, peut-être à tout jamais, un asile contre l'esprit du monde, une retraite où nous pourrons être vertueuses sans craindre de le paraître". L'année suivante, après les plus gros travaux de réparations et l'aménagement des logements destinés aux aliénées, quinze femmes aliénées sont transférées de la maison de Mondeville à l'ancien couvent des Capucins. Le Bon Sauveur de Caen existe de nouveau au grand jour et c'est avec l'accueil des aliénées qu'il reprend ses fonctions. 41 personnes y vivent d'abord : 15 aliénées, 2 dames pensionnaires (dites "en chambre"), 1 demoiselle "pour l'éducation", 21 religieuses et 2 prêtres, dont bien sur l'abbé Jamet. Une lettre non datée mais rédigée très vraisemblablement à cette époque prouve bien cette orientation de la Communauté vers le soin des aliénées mais aliénées capables si possible de payer une pension : "(...) leur hospice n'étant point doté et n'ayant d'autre revenu que le bien patrimonial des sœurs, ne sont pas destiné à recevoir des aliénées de la classe des pauvres, mais celles qui appartenant à des familles honnêtes sont trop peu fortunées pour payer une pension dans les maisons de santé, et trop au-dessus de la classe des pauvres pour être renfermées dans des maisons de force, telles que Bicêtre ou la Salpetrière. Quelques unes sont reçues au Bon Sauveur pour le tiers ou même le quart de la pension (...) d'autres y sont gratuitement. Il y en a déjà cinq de ce genre... C'est tout le problème de l'accueil des aliénés indigents tel qu'il va se poser bientôt au Bon Sauveur. Sans l'inlassable activité de l'abbé Jamet, le nouveau Bon Sauveur aurait eu bien du mal à reprendre l'essor interrompu par la Révolution. Il a d'abord fallu vaincre les difficultés administratives. Dès 1805, une première demande d'approbation de statuts a été expédiée sous couvert du préfet du Calvados au Ministre des Cultes. Une nouvelle demande est adressée en 1809. Dans ces statuts, le redressement des filles de mauvaise vie a définitivement disparu, tandis que "le soin des fous et des folles dont il est tenu une pension nombreuse, prend définitivement la première place. On remarquera que désormais la vocation d'asile aliénés du Bon Sauveur comprend aussi bien des hommes que des femmes. (En fait, aucun aliéné ne sera reçu au Bon Sauveur avant 1820.) Il a fallu aussi vaincre d'innombrables difficultés financières en achetant maisonnettes et terrains voisins, en réparant, en construisant. Au temporel comme au spirituel, l'abbé Jamet excelle. Il mérite bien son titre de second fondateur du Bon Sauveur, après la Mère Anne Leroy qui avait créé en 1723 à Vaucelles l'Association de Marie. En 1815, le Bon Sauveur est déjà a l'étroit : on est passé en quelques années de deux dames pensionnaires à cinquante ; le nombre des aliénées a doublé ; un pensionnat de sourds-muets a été créé à l'initiative de l'abbé Jamet, tout particulierement intéressé par cette éducation. En même temps qu'effectifs et superficie, croît la réputation de l'établissement, tant et si bien qu'en 1816, le comte de Montlivault, préfet du Calvados, embarrassé par la conversion de la Maison de Beaulieu en maison centrale de détention (excluant par conséquent les aliénés indigents), songe au Bon Sauveur. Après des hésitations provoquées par la crainte d'aliéner une partie de leur autonomie, de remplir désormais des fonctions franchement hospitalières, et plus simplement par celle de devoir accueillir des hommes, les religieuses, encouragées en cela par l'abbé Jamet et par les autorités diocésaines, acceptent la proposition de l'administration départementale. Nouvel élan de charité ? Carte à jouer dans un projet général d'expansion de la Communauté ? Les deux raisons, après tout, ne sont pas incompatibles.    Le 17 juin 1818, un premier traité est signé entre le préfet du Calvados et la Communauté : le Bon Sauveur accueillera désormais les fous et les folles au compte du département et par conséquent indigents. Les constructions rendues nécessaires par l'accueil d'un premier contingent de quarante malades seront financées par un prêt du département (50 000 F) et devront être achevées dans les dix-huit mois. Epileptiques indigents et sourds-muets indigents seront également accueillis par le Bon Sauveur. Chacune des parties contractantes ne pourra renoncer à ce contrat qu'en avertissant l'autre partie trois ans à l'avance. Le Conseil général du Calvados entérine le 15 octobre 1818. La date de 1818 est un véritable tournant pour le Bon Sauveur qui passe ainsi de l'hospice privé à l'asile privé faisant fonction d'asile public alors qu'il n'existe encore en France que huit établissements spéciaux destinés à recevoir les malades mentaux. Le 7 janvier 1822, le comte de Montlivault "voulant contribuer à la prospérité de la maison du Bon Sauveur et désirant obtenir des rapports fréquents sur le traitement sanitaire des aliénés qu'elle renferment et notamment des individus qui y sont entretenus aux frais du département, confirme par arrêté préfectoral le Docteur Jacques Athanase Trouvé, médecin chef des Hospices de Caen, dans les fonctions de médecin des sourds-muets et des aliénés que venait de lui confier l'abbé Jamet. Deux ans plus tard débute la construction de l'énorme bâtiment Sainte-Marie destiné à recevoir 300 femmes aliénées. Architecture asilaire hardie pour l'époque et dans le choix de laquelle l'abbé Jamet semble avoir joué un rôle de promoteur. Le nombre des internés ne va dès lors cesser de croître 97 en 1817, 120 en 1820, 170 en 1823 (100 femmes et 70 hommes), après un nouveau prêt du département. Dans le même temps, le nombre des religieuses est passé d'une vingtaine à 125, auxquelles s'ajoutent 20 employés laïcs. Le Bon Sauveur est déjà un grand asile. A époque où arrivent au Bon Sauveur les premiers aliénés du sexe masculin, à quoi pouvait ressembler le Bon Sauveur ? "Le terrain est grand, écrit la Mère Supérieure en 1818 au préfet (...). Les folles sont un peu plus resserrées dans leur enceinte que les hommes. Leur maison n'est pas aussi commode" (le grand pavillon Sainte-Marie n'est pas encore construit à cette date et celui de Saint-Joseph, pour les hommes, est en cours de construction) ; "cependant, elles sont bien. Le local est dans un air salubre, bien aéré. Une petite rivière (le petit Odon) longe l'habitation des femmes et traverse celle des hommes. La salle des bains froids pour les femmes est bâtie sur cette rivière. Pour les hommes, on y fait passer un canal. Les latrines sont également placées sur le cours, ce qui ôte la mauvaise odeur si nuisible et si désagréable dans certains établissements. Nous avons partout un 1er étage sur les cellules. Le corps principal de la maison a deux étages. Le second est destiné aux .gens de service. Toutes les cellules du rez de chaussée sont élevées à deux pieds au-dessus du sol, afin qu'elles soient moins humides. Nous n'avons point de dortoirs communs. Chaque insensé a sa cellule. On met peu de malades à l'infirmerie. Ils sont plus tranquilles et plus sainement dans des chambres isolées." (Dans ce texte, le terme de cellule doit en effet être compris dans le sens d'une chambre isolée et non d'une cellule de contention.) Une requête adressée au Roi Louis XVIII en 1820 nous donne un aperçu sur le fonctionnement du service : "On compte déjà 120 aliénés, c'est à dire 38 hommes et 82 femmes ; sur ce nombre 56 fous de l'un et l'autre sexe sont à la charge du Département du Calvados, 4 gratis après sa demande, et 8 y sont admis gratuitement par les religieuses qui se privent elles-mêmes du nécessaire pour venir au secours de ces malheureux (...) Les autres sont aux frais de leurs familles. Deux médecins, attachés à l'établissement, donnent aux aliénés tous les secours médicaux que peut exiger ou permettre leur état. Mais on s'étudie spécialement à employer les remèdes moraux. Ce sont des religieuses qui soignent les femmes, et qui veillent sur les gardiens préposés au service des hommes. Cette maison, seule en France qui soit dirigée par des religieuses, a été assez heureuse pour obtenir un très grand nombre de guérisons et l'expérience prouve tous les jours que la douceur et les bons traitements font beaucoup plus que tous les secours de la médecine..." Bientôt, les rapports de l'Inspection Générale ne seront pas si idylliques. Le Bon Sauveur poursuit sa croissance vertigineuse et atteint 300 internés en 1833. Entre 1820 et 1840, sa superficie double. Même si l'on fait la part de la tradition hagiographique, il est certain que les financements sans cesse grandissants du Bon Sauveur ont été maîtrisés de main de maître par le père Jamet (avec l'âge, on lui donne désormais ce titre) sans lequel une pareille expansion n'aurait pas été possible. Au lendemain des Trois Glorieuses, le père Jamet, qui vient de renoncer à la charge de Recteur qu'il assurait depuis 1824, se consacre encore plus complètement à ce qui constitue son unique vocation et son véritable sacerdoce : Supérieur du Bon Sauveur. En dépit de ses 68 ans, non seulement il s'emploie inlassablement à négocier les achats de maisons et de terrains nécessaires à l'agrandissement du Bon Sauveur mais encore il s'évertue à fonder d'autres communautés. C'est chose faite en 1832 avec la création de la succursale d'Albi, puis en 1837 avec celle de Pont-l'Abbé, Picauville dans la Manche, toutes deux destinées à recevoir également des aliénés. Voyageur infatigable, le père Jamet va d'une communauté à l'autre, rédige les nouveaux statuts, fait le siège du ministère pour obtenir leur approbation et faire du Bon Sauveur une véritable congrégation (le 22 avril 1827, une Ordonnance de Charles X a homologué l'installation du Bon Sauveur en autorisant définitivement la Communauté). Le 30 juin 1838, le vote de la loi sur les aliénés institue à l'échelon national ce qui existait déjà au Bon Sauveur depuis vingt ans. C'est toutefois une nouvelle époque qui commence alors, celle du "siècle d'or" de la psychiatrie. Quand au père Jamet, il meurt en 1844, laissant en pleine ville un établissement de près de 14 hectares formé par plus de trente acquisitions successives et comptant près de 600 aliénés."

    in Du Bon Sauveur au C.H.S. par P. Morel et C. Quettel, Pp. 18 à 28 ; Editions du Lys 1992.


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